L'excellent magazine catholique Monde & Vie a publié une une recension de l'ouvrage qui fait débat sur le rôle des musulmans dans la transmission de l'héritage grec.
Ce canard de la transmission par les Arabes de notre héritage grec a été inventé de toutes pièces au XIXe siècle par des historiens hostiles à l'Eglise et il se transmet de génération en génération. Dans le contexte actuel, l'islamophilie de toute une intelligenzia n'est qu'un autre visage de l'antichristianisme traditionnel de la gauche.
Aristote au Mont-Saint-Michel :
Les racines grecques de l'Europe chrétienne
Sylvain Gouguenheim
Seuil, 280 p., 21 €.
Ce que nous ne devons pas à l’Islam
On considère généralement que l'Occident a découvert le savoir grec au Moyen Âge, grâce aux traductions arabes. Sylvain Gouguenheim bat en brèche une telle idée en montrant que l'Europe a toujours maintenu ses contacts avec le monde grec. Le Mont-Saint-Michel, notamment, constitue le centre d'un actif travail de traduction des textes d'Aristote en particulier, dès le XIIe siècle. On découvre dans le même temps que, de l'autre côté de la Méditerranée, l'hellénisation du monde islamique, plus limitée que ce que l'on croit, fut surtout le fait des Arabes chrétiens. Même le domaine de la philosophie islamique (Avicenne, Averroès) resta en partie étranger à l'esprit grec. Ainsi, il apparaît que l'hellénisation de l'Europe chrétienne fut avant tout le fruit de la volonté des Européens eux-mêmes. Si le terme de "racines" a un sens pour les civilisations, les racines du monde européen sont donc grecques, celles du monde islamique ne le sont pas !
Sylvain GOUGUENHEIM dans son livre intitulé "Aristote au mont Saint Michel" qui vient de paraître aux éditions du Seuil, tord le coup à un mythe islamophile éculé qui perdure encore et toujours dans de nombreux esprits incultes et dhimmisés : les musulmans n'ont pas fait découvrir la philosophie grecque en particulier platonicienne et aristotélicienne aux barbares chrétiens d'occident venu reconquérir la Palestine entre 1096 et 1291 ! Des Arabes chrétiens d'Orient ont effectivement échangé une partie de leur savoir avec leurs frères chrétiens d'Occident et ce bien avant 610. Pour les contacts entre Chrétiens d'Occident et les musulmans, il faudra attendre la période dite des royaumes de Taïfa (1031-1085) qui permis une certaine tolérance religieuse dans quelques royaumes (pas dans tous). Nous savons d'ailleurs que l'âge d'or andalous n'a duré au mieux qu'un siècle sur une période de soumission à l'islam en Espagne de presque huit siècles et que ce petit îlot de tolérance fut une véritable trêve miraculeuse au milieu d'un océan de persécutions des juifs et des chrétiens sur cette terre d'islam. Depuis la conquête musulmane les conversions forcées avaient instauré une mixité religieuse contre nature (pour le judaïsme notamment) au sein des familles. Sous les royaumes des Taïfa les alliances guerrières eurent raison des divergences religieuses. Le médiéviste Jean FLORI à propos du mythe de "l'age d'or andalous" parle de "tolérance religieuse condescendante", car au fur et à mesure une certaine "mixité" s'était installée et des compromis entre juifs convertis, chrétiens convertis et musulmans se sont créés par nécessité puis par lassitude des conflits. Avec l'arrivée des nouvelles vagues de musulmans dès 1086 avec les Almoravides (puis à nouveau à partir de 1136 avec les Almohades) le djihad mis un terme à "cette tolérance religieuse condescendante" et les persécutions des dhimmi reprirent selon le"fiq" (droit musulman)...
N'en déplaise au Dr. (en chirurgie) Maurice BUCAILLE qui a tenté maladroitement de faire du concordisme dans son ouvrage sur le Coran et la science, nous savions déjà que les musulmans n'avaient inventé ni les chiffres en base dix (que leurs ont transmis les Indous), ni même l'algèbre et encore moins la théorie sur l'héliocentrisme qu'ils tenaient vraisemblablement aussi de savants indous (même si la théorie d'Aristarque de Samos (env. 310-230 av. JC ) était bien connue des savants juifs et chrétiens du Proche et du Moyen Orient anciens depuis plusieurs siècles). Avec le livre de Sylvain GOUGENHEIM nous savons qu'ils n'ont pas transmis non plus la philosophie grecque aux moines chrétiens d'occident.
Quant à l'héliocentrisme, presque un siècle avant Copernic en Occident, le cardinal Nicolas de CUES faisait paraître en 1440 un ouvrage intitulé "la docte ignorance" démontrant que non seulement la Terre n'était pas le centre du système solaire mais en plus que le Soleil ne pouvait pas être le centre de l'Univers... (En avance sur COPERNIC qui faisait du soleil le centre de l'univers dans son ouvrage "De revolutinibus orbium coelestium"). Ce cardinal s'était inspiré des travaux et hypothèses sur le mouvement diurne de la terre du mathématicien et philosophe Jean Buridan (1295-1360) repris par son disciple le savant (mathématicien, physicien et économiste surnommé l’« Einstein du XIVe siècle») Nicole Oresme (1325-1382) qui fut le premier a contré la théorie aristotélicienne du poids et à ouvrir la voie vers l'héliocentrisme (cf. Le Traité du ciel et du monde écrit par Nicole ORESME jamais imprimé est souvent cité par de nombreux savants du Moyen âge et scientifiques actuels).
B de Saint-Hilaire.
Il faut vraiment en finir avec toute cette désinformation sur les apports de l'islam aux incultes barbares occidentaux et s'en tenir aux faits historiques pour purger nos universités et notre intelligentsia islamophile de cette dhimmitude mentale.
Dans un style moins polémique, voici ce qu'en dit Stéphane Boiron dans Le Figaro
Les tribulations des auteurs grecs dans le monde chrétien
Contredisant la thèse d'un «islam des Lumières», Sylvain Gouguenheim montre que le savoir grec antique n'a jamais disparu d'Europe et que les Arabes qui traduisirent ces textes n'étaient pas des musulmans.
On se souvient de la récente polémique qui a entouré la conférence tenue à l'université de Ratisbonne, le 12 septembre 2006, par Benoît XVI, alors accusé d'avoir lié islam et violence. Loin de s'adresser au monde musulman, il s'agissait pour le Saint-Père d'aborder les rapports entre foi et raison et de dénoncer le « programme de déshellénisation » de l'Occident chrétien.
Éclairant fort à propos ce débat, l'historien Sylvain Gouguenheim montre que la qualification d'« âges sombres » ne convient pas à la période médiévale. En effet, l'Europe du haut Moyen Âge ne s'est jamais coupée du savoir grec, dont quelques manuscrits restaient conservés dans les monastères. Des noyaux de peuplement hellénophone s'étaient maintenus en Sicile et en Italie du Sud, Salerne ayant ainsi produit une école de médecine indépendante du monde arabo-musulman. Enfin, durant les premiers siècles du Moyen Âge, il existait aussi une « authentique diaspora chrétienne orientale ». Car, nous dit l'auteur, si l'islam a transmis le savoir antique à l'Occident, c'est d'abord « en provoquant l'exil de ceux qui refusaient sa domination ». Assez naturellement, les élites purent se tourner vers la culture grecque, favorisant ces mouvements de « renaissance » qui animèrent l'Europe, de Charlemagne à Abélard. D'ailleurs, avant même que les lettrés ne vinssent chercher en Espagne ou en Italie les versions arabes des textes grecs, d'importants foyers de traduction de manuscrits originaux existaient en Occident. À cet égard, M. Gouguenheim souligne le rôle capital joué par l'abbaye du Mont-Saint-Michel où un clerc italien qui aurait vécu à Constantinople, Jacques de Venise, fut le premier traducteur européen d'Aristote au XIIe siècle. Ce monastère serait donc bien « le chaînon manquant dans l'histoire du passage de la philosophie aristotélicienne du monde grec au monde latin ».
Une hellénisation restée superficielle
Le savoir grec n'avait pas davantage déserté le monde oriental. Byzance n'a jamais oublié l'enseignement de Platon et d'Aristote et continua à produire de grands savants. Il faut ici saluer l'influence essentielle des chrétiens syriaques, car « jamais les Arabes musulmans n'apprirent le grec, même al-Farabi, Avicenne ou Averroès l'ignoraient ». L'écriture arabe coufique fut forgée par des missionnaires chrétiens qui donnèrent aussi aux Arabes musulmans les traductions des œuvres grecques. De ce point de vue, l'arrivée au pouvoir des Abbassides, en 751, ne constitua pas une rupture fondamentale. Contredisant la thèse d'un « islam des Lumières », avide de science et de philosophie, l'auteur montre les limites d'une hellénisation toujours restée superficielle. Il est vrai que la Grèce représentait un monde radicalement étranger à l'islam qui « soumit le savoir grec à un sérieux examen de passage où seul passait à travers le crible ce qui ne comportait aucun danger pour la religion ». Or ce crible fut très sélectif. La littérature, la tragédie et la philosophique grecques n'ont guère été reçues par la culture musulmane. Quant à l'influence d'Aristote, elle s'exerça essentiellement dans le domaine de la logique et des sciences de la nature. Rappelons que ni La Métaphysique, ni La Politique ne furent traduites en arabe.
Parler donc à son propos d'hellénisation « dénature la civilisation musulmane en lui imposant par ethnocentrisme ? une sorte d'occidentalisation qui ne correspond pas à la réalité, sauf sous bénéfice d'inventaire pour quelques lettrés ».
Félicitons M. Gouguenheim de n'avoir pas craint de rappeler qu'il y eut bien un creuset chrétien médiéval, fruit des héritages d'Athènes et de Jérusalem. Alors que l'islam ne devait guère proposer son savoir aux Occidentaux, c'est bien cette rencontre, à laquelle on doit ajouter le legs romain, qui « a créé, nous dit Benoît XVI, l'Europe et reste le fondement de ce que, à juste titre, on appelle l'Europe ».
Aristote au Mont-Saint-Michel, Les Racines grecques de l'Europe chrétiennede Sylvain Gouguenheim, Seuil, 280 p., 21 €.