lundi 31 mars 2008

Insuportable discrimination

La patate chaude de la fosse commune découverte à Alcala de Henares ne refroidit pas. En dépit des efforts du gouvernement pour en cacher l'invention par des ouvriers creusant des fondations, la nouvelle de sa découverte continue de faire des vagues en Espagne. L'enquête préliminaire diligentée à la requête d'un magistrat militaire cherche à déterminer ses dimensions. Des indices laissent supposer qu'elle ferait environ 150 m de long, ce qui augure d'un nombre d'assassinés dépassant la centaine.

La réaction de la gauche est très révélatrice de son état de déni permanent de la réalité. Le journal gouvernemental El Pais a cherché par tous les moyens à rejeter la responsabilité des morts sur le camp nationaliste dans une vaine tentative pour dédouaner les tueurs du Front populaire. Un de ses journalistes a publié une étude dans laquelle il affirme que le lieu de la découverte a servi de camp de concentration durant les années 1940. Les historiens n'ont pas tardé à prouver que les affirmations du quotidien socialiste sont incompatibles avec les faits tels qu'on en retrouve la trace dans les archives.

Les documents révèlent que ce camp a servi de centre de rétention et de triage pour les frontpopulistes entre avril et novembre 1939, quand il fallait démobiliser les dizaines de milliers de prisonniers du front de Madrid. Rien ne permet de supposer que des exécutions sommaires ont eu lieu durant ces mois.

Bien au contraire. Il est largement démontré que le gouvernement espagnol a conduit une répression à la fois dure, exhaustive et formaliste, s'appuyant sur une procédure judiciaire simplifiée pour juger les survivants du Front populaire. Les vainqueurs n'avaient pas besoin de fosses communes.

Autre fait révélateur. Les dirigeants de l'organisation partisane « Association pour la récupération de la mémoire historique » ont déclaré qu'ils n'aideront pas les familles des morts retrouvés dans la fosse car ils ne s'intéressent qu'aux victimes des nationalistes.

De même, le gouvernement catalan brille par son absence. Alors que les restes d'une personnalité catalane de premier plan, Andreu Nin, pourraient se trouver dans cette fosse, le conseiller Joan Saura en charge de ces questions reste muet comme une carpe et sa créature, le Memorial Democratic est aux abonnés absents.

Le gouvernement catalan et la bourgeoise reconvertie dans l'indépendantisme sont coutumiers de la mémoire sélective. Comme le remarque le journaliste Pedro Fernandez Barbadillo, une bonne partie des personnalités catalanes auxquelles ont rend hommage en ce début de XXIe siècle ont par la force des choses un passé franquiste. Comme ce passé est incompatible avec l'image que cette bourgeoise veut donner d'elle-même aujourd'hui, elle en efface les traces.

Un exemple caricatural a été offert sur un plateau par le quotidien gouvernemental catalan la Vanguardia española dans l'hommage qu'il a rendu à Martín de Riquer, père du propriétaire du quotidien et actuel duc de Godó. Les défenseurs de la probité journalistique ont tout simplement omis de sa biographie que Martín de Riquer a fait la guerre comme volontaire aux côtés de Franco et qu'il a organisé le défilé des troupes victorieuses dans les rues de la capitale catalane. Ensuite, il a dirigé la propagande de la Falange avant de faire carrière dans l'université et entrer deux fois au parlement sur nomination directe par Franco.

A l'inverse, ses descendants ont changé d'allégeances et font carrière dans l'indépendantisme. Un de ses fils, Borja, est même l'un des promoteurs de la mémoire historique à la sauce rose. Pourquoi n'a-t-il pas commencé par son propre papa ?

samedi 29 mars 2008

Le mystère de la disparition des noms patronymiques juifs

Une famille d'immigrants boers à leur arrivée à Ellis Island.
Leur nom fut-il aussi adultéré ?


Une des caractéristiques de la vie juive aux Etats-Unis est la présence de nombreux noms patronymiques dont l’ancrage dans la culture traditionnelle est pour le moins tenu. Par exemple, nombre de Juifs américains ont pour nom de famille Green, une adultération du nom traditionnel allemand Grün or yiddish Grin.

Où et quand ces noms ont-ils été changés ? Il existe une légende qui attribue ces modifications aux trop zélés fonctionnaires de l’immigration américaine, notamment ceux d’Ellis Island, le principal point d’entrée aux Etats-Unis, une sorte de gare de triage pour immigrants, construite sur une île au large de New York.

Dans un article de l’excellent magazine juif américain Forward, qui est une irremplaçable porte d’entrée pour cet univers mosaïque si insulaire car à la dimension d’un continent, le chroniqueur Philologos met en pièces ces sornettes et remonte à l’origine de cette rumeur.

Un certain Samuel Forgotson, arrivé aux Etats-Unis en 1860, ne trouva rien de mieux que d’américaniser son nom en Ferguson dans le but de faire couleur locale. Il ne pouvait pas prévoir que son petit-fils Tracy allait se trouver à cause de lui dans une situation délicate. Devenu une personnalité importante de la communauté juive de son époque, il avait en charge les appels de fonds permettant à la communauté de financer d’indispensables projets collectifs. Or, il finit par se rendre compte qu’un appel de fonds signé « Tracy Ferguson » ne rencontrait qu’un écho limité auprès des Juifs auxquels il s’adressait. Pour justifier son nom et en faire un argument utile à son travail, il mit au point une histoire qu’il racontait à chaque réunion publique.

Selon Tracy, son grand-père en arrivant à Ellis Island fut interrogé par un fonctionnaire :

—Quel est votre nom ?
Et notre immigrant juif, ignorant tout de l’anglais de répondre :

Shayn fargesn («je ne comprends pas»).

Et le fonctionnaire d’écrire dans son registre : Sean Ferguson !

Cette petite histoire faisait hurler de rire le public et permettait à Tracy Ferguson de demeurer à la tête de son organisme collecteur de fonds.

Il va sans dire que c’est faux, comme nous le savons déjà. Un détail aurait dû mettre la puce à l’oreille aux auditeurs, Ellis Island n’existait pas en 1860. Quoi qu’il en soit, répétée mille et une fois, cette histoire a fait le tour de la communauté juive américaine et donné naissance à cette légende des fonctionnaires d’Ellis Island américanisant les noms juifs à tour de bras.



Myths and Facts On Language

A common belief that turns out to be a myth, and an assumed myth that might be true: This is the balance sheet of my March 14 column, “Last Names, Lost In Translation.”

For believing in the myth, I have been properly chastised by Arthur S. Abramson of Mansfield, Conn., and the novelist Dara Horn. Mr. Abramson writes that he was “somewhat dumbfounded” by my account of the handling of immigrants by American officials on Ellis Island, and continues:

“The Ellis Island official did not depend simply on his understanding of a name as uttered by the immigrant. Rather, he had before him the vessel’s passenger list, which had been prepared well before arrival in New York harbor. Indeed, the lists were generally made up at the port of embarkation in Europe. Once a name was matched with a person from that vessel, the official just had to copy it from the list. The myth about the changing of names by Ellis Island officials has long been debunked in genealogical circles.”

To which Ms. Horn adds the additional corrective:

“By the time Ellis Island was up and running in 1892 (immigrants to New York in the decades prior to this were processed at a smaller facility called Castle Garden on Manhattan proper), the official apparatus was vast enough for there to be no shortage of translators for even the more obscure European languages (and Yiddish hardly qualified as obscure) — Fiorello LaGuardia was one of the more famous ones. Moreover, the immigration officials often didn’t even need to resort to translators, since they themselves were frequently multilingual in the relevant languages. The idea that immigration officers were simply overwhelmed rent-a-cops, filling out forms and accidentally turning Cohens into Kennedys on a daily basis, is a bobe mayse. What’s interesting about it is that our bobes themselves made it up, because names that were changed during the immigration process were almost always changed by the immigrants themselves. Many such changes, including the example in your column of Vaytz being changed to Weiss, most likely reflected Jewish social anxieties that we scarcely remember now, such as the desirability of a German-sounding rather than Eastern-European-sounding name. For many people, it was probably easier to blame Ellis Island for the loss of a family legacy than to take the credit themselves.”

I stand corrected by both these letters. And yet Mr. Abramson has, in a way, just pushed the question of what happened with the transcription of Jewish immigrant names from Ellis Island back to the ports from which the immigrants embarked. This is because the shipping clerks who compiled the lists of passengers in Europe, and had to deal with Yiddish speakers who did not know the Latin alphabet, would have had to make guesses similar to those mistakenly attributed by me to American immigration officials at Ellis Island, so that ultimately the same kinds of inaccuracies and mistakes would have occurred in some of them. These simply would have taken place at an earlier stage in the immigration process.

And on the other hand, the well-known joke I told in the same column about the Jewish immigrant named “Sean Ferguson” would appear to have a kernel of historical truth. Forward reader Eldad Ganin has sent me the following excerpt from a genealogical Web site called Avoteynu (Hebrew for “Our Forefathers”), posted by a researcher named Gary Mokotoff. Mr. Mokotoff writes in the excerpt, “There really was a Sean Ferguson… almost,” and tells us that the origins of the story have been traced to the case of one “Samuel Forgotson,” who immigrated to the United States in the 1860s. According to his grandson, Tracy Ferguson of Syracuse, N.Y., Mr. Forgotson settled in upper New York State, where he Americanized his name to Ferguson. Tracy himself eventually became a fundraiser for a Jewish organization. And, Mr. Mokotoff tells us:

“Tracy’s associates pointed out that his peculiarly non-Jewish name, Ferguson, might be a detriment to his fund-raising ability, so Tracy turned disadvantage to advantage by inventing a story. He told his audience that his unusual name was derived in an unusual way when his grandfather, Samuel Forgotson, arrived at Ellis Island and blurted out in a moment of panic ‘Shayn fargesn’ to the question, ‘What is your name?’ The story brought gales of laughter from the audience, so Tracy continued to use it as a warm-up introduction in his appeals for funds…. The story so caught the fancy of the public that it was passed from person to person until it became part of Jewish-American folklore.”

Although, as Dara Horn points out, Ellis Island was not yet an immigrant station in the 1860s, this would indeed seem to be the source of the “Sean Ferguson” story —and the story itself, it strikes me, may have even more truth in it than Mr. Mokotoff allows. After all, where could the strange English name “Forgotson” have come from? Isn’t it likely that this was some shipping clerk or immigration official’s private joke, made when a Jewish immigrant to the United States couldn’t remember the name he had invented for himself? I, at least, can’t think of a better explanation of it. Under the name of Samuel Forgotson, Sean Ferguson may have really existed.


Questions for Philologos can be sent to philologos@forward.com.

vendredi 28 mars 2008

Taizé à la loupe


L'historien Yves Chiron a répondu à quelques questions à l'occasion de la parution de son dernier livre aux éditions Perrin : Frère Roger, le fondateur de Taizé.


Vous êtes l'auteur de biographies remarquées sur un pape ou un saint.
Pourquoi cet intérêt pour le fondateur d'une communauté somme toute modeste ?

Taizé n’est pas une communauté « modeste ». Il y a actuellement une centaine de frères. Et, chaque année, cette communauté attire des dizaines de milliers de jeunes en Bourgogne ou une grande ville d’Europe (ou du monde) où elle invite ceux qui veulent venir. Aucune communauté religieuse dans le monde n’a actuellement un tel rayonnement. Plusieurs évêques ou Pères abbés actuellement en fonction dans l’Eglise ont été marqués et influencés par Taizé.
Mais j’ajouterai que quand on parle d’ « influence », il faut le faire à triple sens si je puis dire : Taizé a influencé le catholicisme, Taizé a influencé (de manière différente) le protestantisme et Taizé a été influencé par l’Eglise catholique.

Au départ de toute nouvelle communauté religieuse il y a une intuition. Quelle était celle de frère Roger ?
L’intuition première de Frère Roger était une communauté spirituelle adossée à communauté de travail : travail intellectuel et travail manuel, pour subvenir aux besoins. Ce n’est que progressivement que la dimension œcuménique a pris la première place.

Comment frère Roger a-t-il pu obtenir le soutien de Pie XII ?
Pie XII n’a pas « soutenu » Taizé. Il a accepté, à deux reprises, de recevoir les deux fondateurs de Taizé, parce qu’il a cru qu’ils pouvaient peut-être, un jour, se convertir au catholicisme. Les fondateurs de Taizé donnaient, à cette époque, cette impression à beaucoup de leurs interlocuteurs catholiques.

Frère Roger est-il mort catholique ?

Frère Roger est « formellement catholique » a dit le cardinal Kasper, en charge des questions œcuméniques à Rome, au cardinal Barbarin qui l’interrogeait en 2005 sur l’appartenance religieuse de Frère Roger. C’est le cardinal Barbarin qui m’a rapporté le propos dans une lettre. Aller plus loin demande une longue exégèse.

Vous définissez-vous comme un historien catholique ou comme un catholique qui fait de l'histoire ? Peut-on concilier identité religieuse et démarche scientifique ?

Je répondrai : les deux.
Un « catholique qui fait de l’histoire » doit faire de l’histoire comme n’importe quel historien. Cela signifie partager avec les autres historiens une méthode et des objectifs : connaître le passé en s’efforçant de faire des investigations tous azimuts (archives, témoignages, contexte, etc.). En ayant à l’esprit que l’histoire reste un art de l’approximation.
Un « historien catholique » c’est un historien qui, au terme de ses recherches, sait que Dieu n’est pas absent de cette histoire. Dieu ne guide pas l’histoire comme un marionnettiste qui ne laisserait aucune liberté et initiative aux hommes. Il intervient si on fait appel à Lui, et il laisse aux hommes leurs responsabilités, y compris celle de se détourner de Lui. Et puis il y a le sens final de l’histoire. Un historien chrétien sait comment l’histoire se terminera un jour : par le retour du Christ et le Jugement dernier. Cela relativise les événements de l’histoire.

Yves Chiron sera l’invité de RADIO NOTRE-DAME, demain samedi 29 mars, de 11 à 12 h, pour parler de son dernier livre : Fère Roger, le fondateur de taizé (Perrin, 416 pages).

Nolte disponible en français

Ernst Nolte.


Dans l'édition du Figaro datée d'hier, le journaliste Paul-François Paoli écrivait un portrait d'Ernst Nolte, un historien qui échangea avec François Furet une correspondance faite de controverse et de passion.


L'homme par qui le scandale arrive
Ernst Nolte parle lentement dans une langue française qu'il maîtrise inégalement, moins en tout cas que l'italien, qu'il a appris en allant régulièrement dans un pays où ses livres ont peut-être été mieux accueillis qu'en France. Les cheveux blancs, la taille très élancée, l'historien allemand, qui a aujourd'hui 77 ans, et que nous avons rencontré à Paris où il est venu pour quelques jours, impressionne par sa distinction. Son nom n'a cessé, depuis des années, d'engendrer la polémique, mais rien dans son personnage ne laisse transparaître la moindre nervosité.

Pour ce philosophe de formation il fut l'élève de Heidegger , qui enseignait l'allemand et les langues anciennes à la faculté de Bonn, après une guerre qu'il n'avait pas faite, la vie était partie pour ressembler à un long fleuve tranquille, jusqu'à la publication, en 1963, d'une trilogie qui allait connaître un succès mondial : Le Fascisme dans son époque. Comment est née la génèse de ce triptyque monumental consacré à l'Action française, au fascisme italien et au national-socialisme, Ernst Nolte le raconte dans une esquisse d'autobiographie intellectuelle publiée dans Fascisme et totalitarisme (1) à l'occasion de la réédition, en un seul volume, de ces trois ouvrages préfacés par l'historien Stéphane Courtois, auxquels s'ajoute une sélection d'articles inédits de Nolte sur son œuvre et sa réception. « C'est seulement en raison d'un événement fortuit, la lecture de textes du jeune Benito Mussolini, marxiste radical à ses débuts, que je décidai, m'appuyant sur ce que cet homme présentait de singulier, de faire plus de clarté sur des problèmes de l'histoire contemporaine qui avaient donné lieu à bien des discussions, mais qui en étaient encore au stade d'une toute première réflexion », écrit Nolte dans son esquisse.

Bien accueilli, notamment dans les milieux de gauche, son livre faisait de la pensée de Maurras la matrice «  préfasciste » d'une réaction révolutionnaire, antilibérale et antimarxiste, qui allait submerger l'Europe au lendemain de la guerre de 1914-1918, et que l'on retrouverait à l'œuvre dans le fascisme mussolinien et dans le national-socialisme, qualifié de «  fascisme radical ». Au fur et à mesure de ses recherches sur la « guerre civile idéologique » qui a ravagé l'Europe entre les deux guerres, Ernst Nolte s'intéresse à la révolution russe et à ses conséquences. Découvrant un discours hallucinant de Zinoviev, chef bolchevique proche de Lénine qui, le 17 septembre 1917, prévoit l'extermination de 10 millions de Russes rebelles au communisme, il ébauche l'idée d'une relation de dépendance entre les deux idéologies, communiste et fasciste.

Récusant la thèse de l'irrationalité historique du national-socialisme, il fait même de la révolution communiste, qualifiée de « catastrophe originelle du XXe siècle », la cause essentielle de la contre-révolution fasciste. L'affirmation nourrit la fameuse «  querelle des historiens » (Historikerstreit) qui défraye la chronique en Allemagne de l'été 1986 à 1988, au cours de laquelle le penseur Jürgen Habermas qualifie, parmi d'autres historiens, Ernst Nolte de révisionniste, l'accusant de minimiser les causes endogènes propres à l'histoire de l'Allemagne dans l'avènement du nazisme et ainsi de minimiser les responsabilités de ce pays dans la Shoah. Pour Nolte, qui publie, en 1987 en Allemagne, La Guerre civile européenne 1917-1945, ce procès relève de la sorcellerie idéologique.

Revel et Furet le soutenaient
« J'avais lu Hitler et il était clair pour moi que son ennemi premier était le marxisme et non les Juifs, réaffirme-t-il aujourd'hui. L'antisémitisme était moins chez lui une obsession qu'une optique idéologique nécessaire à la dénonciation de ce qu'il appelait le “judéo-bolchevisme”, notion qui fut d'autant plus efficace que de nombreux Juifs occupaient des postes dirigeants dans les instances communistes ». Il a été pris à partie parfois violemment il a été agressé et sa voiture brûlée , mais son travail est soutenu en France par Jean-François Revel et surtout François Furet, qui deviendra son ami et avec qui il échange une correspondance qui sera publiée en 1998 (2).

La polémique est-elle close pour autant ? Il y a lieu de penser que non, même si, dans Entre les lignes de front (3), ouvrage d'en tretiens qu'il publie avec Siegfried Gerlich où il est question aussi de ses relations avec Heidegger, Ernst Nolte peut difficilement être accusé de minimiser le crime commis par les nazis. Il affirme même « que l'extermination national-socialiste fut en définitive “pire” parce que le contexte en fut différent. Les gens étaient exterminés en raison de leurs qualités biologiques ou ethniques, alors que dans l'idéal-type de la révolution marxiste, ils ne devaient à vrai dire qu'être ramenés à leur égalité originelle principe qu'ils auraient en quelque sorte enfreint en appartenant à la classe dominante ».

Un débat complexe, dont l'historien Stéphane Courtois rappelle les enjeux tout à la fois historiques, philosophiques et idéologiques dans sa préface à Fascisme et totalitarisme, en soulignant que la thèse de Nolte sur la relation dialectique entre les deux totalitarismes a été récemment saluée par le philosophe René Girard, qui y a vu l'illustration de sa théorie sur la violence mimétique.
(1) Chez Robert Laffont.(2) Chez Plon. (3) Aux Éditions du Rocher.

jeudi 27 mars 2008

Quels rapports entre la France et le Royaume-Uni ?

Caricature évoquant la publication par la presse britannique d'une photo de Carla Bruni nue.

Timothy Garton Ash connaît ses classiques. Dans son article de ce matin dans le Guardian sur les relations franco-britanniques il soulève un bon nombre de points habituellement négligés. J'en relève deux. L'identité nationale insulaire s'est bâtie au XVIII autour du conflit contre la France. En un sens, à la différence de ses composantes particulières (Ecosse, Pays de Galles, Angleterre, etc.), le Royaume-Uni est une anti-France. Très bien vu.

Enfin, il rappelle qu'en Europe, seuls deux pays ont une capacité de projection militaire et la volonté de s'en servir : la France et le Royaume-Uni, une puissante raison pour mieux s'entendre. Malheureusement, les Anglais sont sourds quand ils sont puissants, et trop loin quand ils sont faibles, recroquevillés quelque part sur les rives du Potomac.

Durant ce temps, les francophobes ne désarment pas. C'est toujours rafraîchissant de les lire, surtout quand ils sont agrémentés de commentaires d'internautes dont l'ignorance historique n'est battue en brèche que par leur mauvaise foi. Ah ces Anglais, qui croient encore qu'ils ont gagné la guerre en 1945!

La principale différence entre la France et l'Angleterre dans la politique de la seconde moitié du XXe siècle est que la France sait qu'elle a perdu la Seconde Guerre mondiale tandis que le Royaume-Uni croit l'avoir gagnée.

A historic compromise with France is exactly what Britain needs
Sarkozy has the right idea, but his fellow conservatives on this side of the Channel won't dare make it a reality


France and Britain can plausibly claim to have the longest-running national rivalry in the history of the world. With brief intermissions, the competition between France and England has been going on for nearly seven centuries, since the hundred years war. The very identity of Britishness, on which Gordon Brown is so keen, was forged in the 18th- and early 19th-century conflict with France. Britain invented itself as the anti-France.

This grand rivalry should continue for another seven centuries - on the football pitch and the rugby field. In politics, it has had its day, and must be replaced by a strategic partnership. Such is the proposition that President Sarkozy presented to Britain yesterday, with fire and eloquence, in what he wryly described as the world's seventh largest French city - London. We, the British, have never had a cross-Channel offer as good as this: an anglophile French president who is determined to add Britain to the Franco-German axis inside the EU; who is pro-American and ready to bring France closer to the military structures of Nato, not least in Afghanistan; and who seeks common ground for action on immigration, climate change, development and security. Britain would be mad not to seize it with both hands.

State visits are also about symbolism, sentiment and style - none more than this one, with Sarkozy's stirring speech to both houses of parliament praising Britain's wartime sacrifice for the liberty of France as well as British economic reforms over the past three decades, and conjuring a new Franco-British fraternité, an entente amicale in place of the old entente cordiale - not to mention the soap opera of Carla among the Windsors. But the essential argument can be made without a soupçon of sentiment, in the language of the cold analysis of power and interests that is one thing the French and the British have in common, and distinguishes them from most Europeans.

It goes like this. France and Britain were, in succession, the greatest powers in Europe. Both had empires; both pursued interests in most corners of the globe. Over the 20th century, the relative power of France and Britain declined in Europe, and the relative power of Europe declined in the world. Now, with the rise of China and India, the relative power of the west as a whole is declining.

At the same time, more and more developments that directly affect our vital national interests - climate change, energy security, pandemics, poverty in Africa, mass migration - are global challenges that no nation state is capable of addressing on its own. A group of states, such as the European Union, is perhaps the smallest unit capable of having a significant impact on them; and even then, only by leading the way to collective action with others.

For the past 50 years the European project has been mainly about Europe itself, from Franco-German reconciliation after the second world war to the reunification of eastern and western Europe after the cold war. For the next 50 years it will mainly be about what Europe does in its relations with the rest of the world, starting with neighbours who are not, in any likely future, going to become members of the European Union. In dealing with the rest of the world, the two most important European countries are France and Britain, precisely because they have the experience and speak the language of global power. If they disagree - as over Iraq five years ago - Europe does not exist as a force beyond its borders. Instead, France and Britain become the poles around or between which other states of a divided Europe align themselves. The result is a cacophony of impotence.

Even if France and Britain agree, Europe may still not exist as a force beyond its borders - that requires the engagement of Germany and other states - but it has a chance. Franco-British cooperation is a necessary condition, though not a sufficient one, for Europe to make a difference on any issue that matters in an increasingly non-European world. That is why we need a strategic partnership, a historic compromise, between Paris and London.

If you accept this logic, two questions remain: how can the theory be turned into practice; and are both countries really up for it? I'm more confident of my answer to the first than to the second. You do it by doing it. You go down the list of problems you face, compare your analyses, your interests and your available instruments, and see what can be done. Occasionally, the answer may be unilateral or bilateral. Sometimes, it may be joint action through the UN - where France and Britain are the two European permanent members of the security council - or through other bodies, including Nato. But nine times out of 10, the answer will have a European dimension. This may be the EU acting as one, or it may be leading European powers acting in concert - for example the "E3" (France, Britain and Germany) negotiating with Iran.

The French presidency of the EU, in the second half of this year, holds some possibilities, especially now that Sarkozy's Union for the Mediterranean has been turned into something half-way sensible. Next year the Lisbon treaty should make it a little easier to coordinate European foreign policy. If they choose to, Britain and France can between them shape the planned European foreign service, seconding their best officials to discover common solutions in areas where we have common European interests. But you have to keep at it, and you have to develop the everyday habits of cooperation, with the French and British working with each other at all levels of public policy. This is how the Franco-German special relationship has been built up, bridging what are arguably larger differences of worldview and foreign policy tradition. The exercise recalls Max Weber's definition of politics - boring holes through thick planks - but it can be done.

The real question is whether both countries are up for this. I fear Britain may not be. Had Sarkozy arrived with this offer 10 years ago, to a Tony Blair still fresh from his first election victory, it would have been a different story. But Brown in 2008 is not Blair in 1998 - neither in his personal instincts nor in his political possibilities. However, it's Sarkozy's fellow rightwingers on this side of the Channel who are most likely to destroy his vision. For on this question most British Conservatives are simply in denial. If you sit with them privately, they may grudgingly accept the logic of the argument I have spelled out. But politically they refuse to follow through to its logical conclusion: if you want to change the world, you have to work through Europe; and, as Sarkozy said in an interview with the Today programme: "If you want to change Europe, you need to have both feet inside it."

They will find this out in the end, after a few years in office, as all their predecessors did; but those years will have been lost, Sarkozy may no longer be there to tango, and the relative power of Britain, France, Europe and the west will be further diminished. The Conservatives are led by highly intelligent people, but on this matter - crucial to the future not just of this country - they are thoroughly earning their old nickname: the stupid party.

Le plus vieil Européen a plus d'un million d'années

Mandibule d'Homo antecessor.

Dans le Figaro, Isabelle Brisson fait le point sur l'article publié par l'équipe d'Atapuerca dans le magazine scientifique Nature.

Une mandibule datant de 1,1 à 1,2 million d'années a été exhumée cet été dans la Sima del Elefante (la «grotte de l'éléphant») qui se trouve dans le massif d'Atapuerca près de Burgos, en Espagne. Elle pourrait appartenir à l'espèce Homo antecessor, selon une récente étude menée par Eudald Carbonell et ses collègues (1). Ce qui en fait le plus ancien fossile humain mis au jour en Europe. Jusqu'à présent, les scientifiques ne disposaient comme trace de vie humaine sur le Vieux Continent à cette époque que des outils et de la faune.

Le massif d'Atapuerca est constitué d'un ensemble de grottes, dont seules trois ont livré des hommes fossiles au cours des dernières années. Non loin de la grotte de l'éléphant, une autre excavation nommée Gran Dolina, a révélé 86 fragments osseux, dont certains appartiennent à un enfant d'une dizaine d'années, mais ces ossements remontent seulement à 780 000 ans. Dans le troisième ensemble fouillé qui s'appelle Sima de los Huesos ou la «grotte des os», les restes sont plus récents (300 000 ans). Rappelons par ailleurs que plusieurs spécimens mis au jour en Géorgie et appartenant à Homo erectus ou à Homo georgicus avec son 1,7 million d'années sont parfois considérés comme les plus anciens Européens, mais le gisement se situe aux portes de l'Europe, carrefour entre l'Afrique et l'Asie.

L'origine de l'homme moderne

Dans leur étude publiée dans Nature, les auteurs ont utilisé le paléomagnétisme pour déterminer que ce nouveau fossile découvert cet été était plus vieux que 780 000 ans, ils ont étudié la faune associée qui était également plus primitive et ont pratiqué des datations cosmogéniques, «ces dernières sont des méthodes expérimentales», indique Jean-Jacques Hublin, anthropologue à l'Institut Max-Planck de Leipzig qui considère que ces datations ne sont peut-être pas définitives. Par ailleurs, il estime que les auteurs disposent de peu d'éléments de comparaisons anatomiques. Enfin, pour lui, «l'homme est un animal tropical et en Europe sa présence est longtemps restée confinée au sud des Alpes. L'adaptation au froid est récente dans l'histoire de l'humanité».

Pour les auteurs de l'étude , ces restes humains d' Homo antecessor pourraient être à l'origine de l'homme de Neandertal et de l'homme moderne. «Nous savons qu'il y a eu plusieurs vagues de migrations, les plus anciennes venant d'Afrique , comme l'attestent les restes mis au jour à Dmanissi en Géorgie, il y a 1,7 d'années», commente Dominique Grimaud-Hervé, anthropologue au département de préhistoire du Muséum (MNHN), pour qui la découverte espagnole est très importante parce qu'elle recule de plusieurs centaines de milliers d'années l'arrivée des premiers Européens. Même si les restes d'Atapuerca n'ont pas encore résolu la question de leur origine. Il faudra sans doute attendre que de nouveaux fossiles confirment une nouvelle migration venant d'Afrique ou d'Eurasie.

Rappelons que l' Homo sapiens archaïque (Homo heidelbergensis) n'est présent en Europe qu'à 40 000 ans avec l'homme de est présent en Afrique dès 600 000 ans, il aurait évolué vers l'homme anatomiquement moderne (Homo sapiens) dont le plus ancien représentant serait daté de 160 000 ans. Une autre migration hors d'Afrique se produit et la présence de cet Homo sapiens est observée au Proche-Orient aux alentours de 100 000 ans dans les sites de Qafzeh et de Skhul, permettant le peuplement des autres parties du monde. L'Homo sapiens Cro-Magnon que l'on trouve en France.

mardi 25 mars 2008

Le féminisme universitaire a du plomb dans l'aile

Hier, Nina Lakhani publiait dans les colonnes de l'Independent une intéressante étude sur la fin des « women studies » dans les universités britanniques. Nées au cours des années 1970, ces études sur les femmes étaient le fief des éléments les plus sectaires du mouvement féministe et ont largement contribué à introduire le « politiquement correct » dans nos vies. Ce sont les activistes québecquoises de ce ce genre universitaire qui ont réussi, par exemple, à imposer l'absurde féministation du français que nous connaissons (par exemple, l'usage du terme auteure).

Or, la bonne nouvelle est que ces « études » n'ont plus la cote auprès des étudiants britanniques. Cette année, ne vont être diplômées que douze jeunes filles dans cette matière. De quoi se réjouir.


Farewell to 'predictable, tiresome and dreary' women's studies

Twenty years ago, it was the academic fashion. This year, its last dozen students will graduate


Women's studies, which came to prominence in the wake of the 1960s feminist movement, is to vanish from British universities as an undergraduate degree this summer. Dwindling interest in the subject means that the final 12 students will graduate with a BA in women's studies from London's Metropolitan University in July.

Universities offering the course, devised as the second wave of the women's rights movement peaked, attracted students in their hundreds during the late 1980s and early 1990s, but the mood on campuses has changed. Students, it seems, no longer want to immerse themselves in the sisterhood's struggle for equality or the finer points of feminist history.

The disappearance of a course that women academics fought so long and hard to have taught in universities has divided opinion on what this means for feminism. Is it irrelevant in today's world or has the quest for equality hit the mainstream?

The course's critics argue that women's studies became its own worst enemy, remaining trapped in the feminist movement of the 1970s while women and society moved on.

"Feminist scholarship has become predictable, tiresome and dreary, and most young women avoid it like the plague," said Christina Hoff Sommers, resident scholar at the American Enterprise Institute for public policy research in Washington and author of Who Stole Feminism? "British and American societies are no longer patriarchal and oppressive 'male hegemonies'. But most women's studies departments are predicated on the assumption that women in the West are under siege. What nonsense."

Others believe young women have shied away from studying feminist theory because they would rather opt for degrees that more obviously lead to jobs, especially since the introduction of tuition fees.

"[Taking] women's studies as a separate course may not feel as relevant to women who go to university to help them enter the job market," said Jean Edelstein, an author and journalist. "As the feminist movement has become increasingly associated with extreme thoughts, women who may have previously been interested in women's studies may be deterred by these overtones."

Anyone ruing the degree's demise can take heart: many gender and equality issues are now dealt with by mainstream courses, from sociology and law to history and English. And many universities, including Oxford, still offer the course to postgraduates.

Mary Evans, visiting fellow at the Gender Institute at the London School of Economics, said: "This final closure does not signal the end of an era: feminist ideas and literature are as lively as ever, but the institutional framework in which they are taught has changed."

Ms Edelstein added: "Feminist critique should be studied by everyone. If integration into more mainstream courses means more people looking at gender theory and increases the number of people who are aware of the issues, then that is a good thing."

But Dr Irene Gedalof, who has led the London Metropolitan University women's studies course for the past 10 years, defended the discipline.

"The women's movement is less visible now and many of its gains are taken for granted, which fuels the perception there is no longer a need for women's studies. But while other disciplines now 'deal' with gender issues we still need a dedicated focus by academics. Despite the gains women have made, this is just as relevant in today's world," she said, blaming the course's downfall on universities' collective failure to promote the discipline.

Given that graduate courses in women's studies are thriving in many countries, such as India and Iran, the decision to stop the course here has surprised many.

Baroness Haleh Afshar, professor in politics and women's studies at the University of York, said: "In the past quarter of a century, women's studies scholars have been at the forefront of new and powerful work that has placed women at the centre but has also had echoes right across academia. In particular, it is important to note the pioneering work of Sue Lees, which began at the Metropolitan and still has a long way to go. I am desolate to see that the university has decided to close it."

lundi 24 mars 2008

Quan la mort est hors de prix

Dans les colonnes du Times de ce matin, la journaliste Catherine Philp publie un long reportage sur la situation tragique dans laquelle se trouve le pays, confronté au régime dictatorial du tyran tropical Robert Mugabe et à une hyperinflation sans équivalent dans le monde.

La Britannique en vadrouille se garde bien de porter des jugements sur l'état du pays et surtout elle ne franchit pas la limite que les Blancs s'imposent à eux-mêmes, ne jamais, jamais, même pas en rêve, comparer le Zimbabwe actuel à la Rhodésie de jadis.

Mais les Africains n'ont pas ces scrupules. Ils connaissent la triste situation qui est la leur, comme celle de Winfildah Takundwa, la veuve de Hilton, qui ne peut pas enterrer son mari faute des 15 euros nécessaires pour payer les services du croque-mort.

En parlant de l'heureux temps de son mariage, en 1965, la vieille dans se souvient :

Il y avait du gâteaux et du poulet, ru riz et des boissons. C'était très chouette.

Quand la journaliste lui demande comment était la Rhodésie d'alors, elle répond :

La Rhodésie ? C'était très beau. On pouvait acheter toute la nourriture dont on avait besoin.

Cruelle désillusion, tant pour ceux qui ont cru bien faire en soutenant la guérilla marxiste de Robert Mugabe, que pour les bonnes consciences qui ont applaudi à l'arrivé au pouvoir de ce dictateur sanguinaire qui, pour le malheur des peuples sous sa botte, est hélas plus bête que méchant.

Funeral costs rise as Zimbabwe elections
loom for Robert Mugabe

Hilton Takundwa died an old man in his own bed —- the only part of this tale that is not a tragedy. On Easter morning his wife Winfildah got up to make the breakfast and Hilton to pray. “Leave me a while so I can speak to my God,” he told her.

Then he got up from his knees and lay back down on his bed. “Now I must rest a while.”

When I arrived that afternoon, Hilton was dead. Inside his filthy bedroom, his body lay under an ancient furred brown blanket on the mattress where he and Winfildah had slept. She crouched on the floor beside the bed, her blind eyes lit with tears.

Next door in the slum dwelling's only other room, the family sat fretting over what to do. Tendai, Hilton's son, had just returned from the undertaker where he went to plead for time to pay the Z$300 million it would cost to take his father's body to the mortuary.

He returned with not only a refusal but worse news yet. In three days the price had risen threefold to Z$1 billion, a mere £12 at black-market rates.

“It's the fuel increase,” he said in despair. Their father's body would stay where it was.

Hilton Takundwa had cheated the odds to live until yesterday, stretching his life out for a full 74 years, exactly twice the average life expectancy for a Zimbabwean male.

But as the years stretched on so the price of death rose until his family could no longer afford to send him with dignity to his grave.

This is Robert Mugabe's Zimbabwe on the eve of this weekend's historic elections; a land of empty shelves and broken hearts where annual inflation runs at 100,000 per cent, turning life into a struggle to survive and death a struggle to afford.

Four months ago the highest denomination note available was Z$200,000. Now it is Z$10 million.

Money earned one day melts into nothing the next and basic commodities are so scarce and expensive that housewives buy carved-off slivers of soap instead of bars and cooking oil is sold by the spoonful not the litre.

The Takundwa family were never rich but they got by. Hilton and Winfildah's three sons worked in textile and canning factories and earned a basic wage.

Ten years ago their youngest son lost his job and committed suicide. Three years after that the other two were laid off.

Diabetes cost Winfildah her sight six years ago, not long after Mugabe's land reform programme started in what was once the breadbasket of southern Africa.

None of the family have had a regular job since, scraping by on profits from selling vegetables by the roadside or mixing up sugar, water and colourings to make a crude soft drink to sell in plastic bags.

Hilton scraped together the cash to buy diabetes medication for himself and his wife. They used to get their treatment free but last year had to start paying.

This month Hilton had gone to the hospital to beg for government assistance. The Takundwas had no family abroad to help them as their luckier neighbours do.

A quarter of the population have left the country as the economy has crumbled and one in three families relies on remittances from relatives abroad. Once it was for extras — school uniforms and books. Now it is for the most basic food.

“Life is very, very hard for us,” Winfildah tells me, her cloudy eyes darting in the gloom. It was not always this way. When she and Hilton married in 1965 their wedding was a big one, a traditional tribal gathering, with hundreds of guests feasting. Her face breaks into a smile as she recalls the day.

“There was a cake and chicken, rice and drinks,” she remembers. “Oh it was very fine.” What was Zimbabwe like back then, I ask. Her reply throws me for an instant: “Rhodesia, oh it was beautiful, we could buy all the food we needed.”

Then her eyes filled with tears. “Zimbabwe, life is very hard. Now I'm crying. You can't even buy a bar of soap. If Mugabe stays it will be worse, even worse than now.”

Zimbabweans are finally daring to dream that might happen. But for the Takundwas, the immediate future looks bleak. Winfildah still needs medication for her diabetes; how much she doesn't know, but whatever it is, she cannot afford it.

“My husband bought it for me, from the money he got from selling the drinks. Now he is gone, I am desperate. I don't know how I will buy it now.”

Tendai comes in to the room and sits on the bed, next to his father's corpse, shame written on his face. He has returned from going round the neighbours, begging for contributions to have his father's body taken away.

They are sympathetic, but he is emptyhanded. The body will have to stay.

The flies were already beginning to circle as we left, Winfildah still sitting in the gloom. Just up the road, stonemasons were hard at work chiselling names into the grave stones that Hilton would never have.

“In loving memory of Father, Benjamin Chimalizeni,” read one, but the dates were missing, blank spaces where the masons had etched the words “Born” and “Died”.

Benjamin Chimalizeni was still alive, it transpired, but his family had bought the gravestone knowing that they would not be able to afford it if they waited until he died.

I flipped through my notebook to where I had written down Hilton's birthdate from his identity card. “23.3.34”. It was his birthday. Hilton had died on his 74th birthday but no one had told us or even remembered. They were too busy trying to survive.

Catherine Philp and Richard Mills paid for the funeral. It cost £12.

dimanche 23 mars 2008

Au secours, ils deviennent fous !

Symboles odieux du franquisme honni ?
Des amateurs rejouent à Bailen la victoire contre les troupes de Napoléon.

Dans son blog, l'écrivain José Vicente Pascual cite un article d'Andrés Cárdenas qui rapporte que récemment, les responsables du collège « 19 juillet » de Bailen, en Andalousie, ont reçu une bien étrange lettre du syndicat des étudiants de Séville. La missive les intimait de changer sur l'heure le nom de leur collège qui « évoque tristement l'époque franquiste où tant de familles ouvrières andalouses ont eu à souffrir d'une cruelle répression ».

Les autorités de la ville de Bailen et le directeur du collège ont répondu au syndicat en expliquant que le nom de l'établissement faisaient référence, non pas au « 18 juillet 1936 », date du soulèvement du général Franco, mais au « 19 juillet 1808 », date de la victoire espagnole contre les troupes de Napoléon.

Commémoration à Bailen de la victoire de 1808.

Les étudiants ont répondu à cette mise au point par une vigoureuse protestation : « Vous utilisez une erreur innocente pour déconsidérer une initiative d'une grande portée politique qui a même reçu l'appui de José Luís Rodríguez Zapatero» et ils concluent en affirmant qu'ils n'auront ni trêve ni repos tant qu'ils n'auront pas effacé du fronton des bâtiments publics tous les noms qui évoquent le régime honni du général Franco.

La prochaine cible des étudiants sévillans si fortiches en histoire est le père Poveda, un prêtre qui a beaucoup fait pour lutter contre l'analphabétisme en Espagne. Quel est son crime ? Etre un « symbole du franquisme ». Pourtant, ce religieux, arrête le 27 juillet 1936 par le Front populaire, est assassiné le lendemain matin sans participer en quoi que ce soit dans la guerre civile. Le 10 octobre 1993 il a été béatifié par Jean-Paul II qui le canonise le 4 mai 2003.


Memoria histérica

Permítanme ustedes que comience contándoles un acaecido, entre preocupante y gracioso, relacionado con mi pueblo. Resulta que allí, en Bailén, hay un Colegio llamado ´19 de julio´, nombre puesto en honor de aquel día en que un ejército andaluz venció a las tropas de Napoleón en la llamada Guerra de la Independencia. Fue un hecho histórico muy importante y por eso este año, en el que se cumple el bicentenario, se quiere celebrar por todo lo alto. Pues bien, un Sindicato Andaluz de Estudiantes se reunió hace unos días en Sevilla y decidió enviar una carta a este colegio, acompañada por una resolución aprobada nada menos por el Consejo Escolar del Estado, en la que se instaba al centro a cambiar de nombre porque, asómbrense ustedes, ¿hace referencia al régimen franquista! Con un par. Señores y señoras, así está el patio educativo en Andalucía. A ellos, a los del sindicato, les debía sonar 18 de julio de 1936 y ni cortos ni perezosos quieren suprimir el 19 de julio de 1808.

Hasta aquí lo gracioso. Ahora viene lo preocupante. La Concejalía de Cultura de Bailén y el director del citado colegio enviaron una carta a los responsables del sindicato para sacarlos de su error y estos, en vez de agachar la cabeza y decir aquello de tierra trágame por demostrar su ignorancia supina con la historia, van y dice que esta equivocación esta siendo utilizada por todos aquellos que no quieren aceptar la Ley de la Memoria Histórica. «Utilizan un error inocente para desprestigiar una iniciativa de gran calado político que ha sido apoyada incluso personalmente por José Luís Rodríguez Zapatero», dicen los estudiantes, los cuales terminan su comunicado diciendo que en Andalucía hay decenas de centros educativos con nombres ligados a la dictadura franquista y «no descansaremos hasta que cambien sus denominaciones, ya que suponen todo un insulto para las familias obreras que tuvieron que sufrir la Guerra Civil y la dictadura». También, en su escrito, el sindicato estudiantil pide que se les quite el nombre todos aquellos centros andaluces que llevan el nombre del Padre Poveda, ya saben, ese linarense que tanto tuvo que ver en la educación de los niños pobres de las cuevas de Guadix y que se preocupó de erradicar el analfabetismo en Andalucía. Hablando de analfabetismo, si estos estudiantes se hubieran interesado por su biografía, que por lo que se ve no lo han hecho, habrían comprobado que este hombre fue asesinado a los diez días (el 28 de julio de 1936) de comenzar la guerra civil y que el único delito que le habían encontrado fue que era cura. Los muy analfabetos se atreven a decir que este hombre es un símbolo franquista, cuando en realidad el pobre ni siquiera se imaginaba que Franco iba a ganar la guerra tres años más tarde. ¿Qué les parece? No solamente estos estudiantes son ignorantes, sino osados, las dos cualidades que permiten identificar a los tontos de capirote, por decir algo que está en consonancia con la Semana Santa.

Como nadie le ponga remedio a tanta estulticia, lo más preocupante para el futuro no será el cambio climático, sino la estupidez de los que están empeñados en demostrar que la inteligencia humana está en peligro de extinción. ´Apañaos´ vamos.>>
Andrés Cárdenas Muñoz (Bailén, 1954), es periodista y escritor. Ha desarrollado gran parte de su carrera profesional en el diario IDEAL de Granada, como redactor, coordinador de suplementos y redactor jefe de cultura entre otros cometidos. Es autor de varios libros de relatos, novelas y ensayos periodísticos. Su última novela, El cántaro roto, ofrece una versión inédita y profundamente documentada sobre la batalla de Bailén y las consecuencias reales que tuvo en la inmediata historia española, así como sobre las vidas de sus principales protagonistas, desde el general Teodoro Reding, artífice de la victoria, a la heroína María Bellido, quien organizó el abastecimiento de agua a las tropas españolas y encarnó en su figura el coraje con que el pueblo de Bailén se enfrentó y derrotó a las, hasta entonces invencibles, tropas napoleónicas.

Aparte de todo lo dicho, Andrés Cárdenas es mi amigo, lo que tengo muy a gala.

samedi 22 mars 2008

Querelles linguistiques

Divoy et Donnet, en flamand seulement.


Dans les colonnes de la Libre Belgique, le journaliste Christian Laporte rapporte les polémiques qui entourent la restauration d'un monument dédié à deux jeunes Flamands qui sont partis rejoindre la RAF en 1941 dans des conditions spectaculaires.

La réaction de la commune flamande reflète l'évolution du rapport de forces né de l'arrivée des troupes anglo-américaines en Belgique à la fin de 1944. A cette époque, la Flandre était associée par les vainqueurs à l'ennemi allemand. Il est donc normal que le monument soit en français, langue naturelle de la Belgique.

Il n'est guère étonnant non plus que des éléments radicaux de la communauté flamande ne supportent plus cette inscription qui leur rappelle de bien mauvais souvenirs. Si la tendance se poursuit, le monument sera déménagé à l'Imperial War Museum à Londres et remplacé par une stèle à la mémoire d'Irma Laplace.

Cette querelle lapidaire reflète bien la désagrégation du régime belgicain, miné par la résurgence d'une nation qu'il croyait avoir définitivement entérrée sous l'opprobre. Il est dommage que ce règlement de comptes se fasse sur le dos de deux authentiques héros.


Overijse "flamandise" même les héros belges de la RAF !

La stèle dédiée à l'exploit de Divoy et de Donnet amputée de sa version française.
Au hit-parade de l'intolérance linguistique, la commune d'Overijse dégaine tous azimuts depuis quelques semaines, mais la dernière décision en date du collège communal risque de faire du bruit jusqu'en haut(s) lieu (x). Le bourgmestre Dirk Brankaer a en effet décidé, à l'encontre de l'opinion de l'Union nationale des évadés de guerre, de flamandiser la stèle évoquant un des plus audacieux exploits de la Seconde Guerre en Belgique ! A savoir l'envol depuis les proches environs du château de Ter Block appartenant au baron Thierry d'Huart, mais alors occupé par les Allemands, d'un avion destiné à permettre à Léon Divoy et à Michel Donnet de rejoindre l'Angleterre pour s'y enrôler dans la RAF.

Le projet avait failli avorter avant de démarrer car si les deux compères avaient repéré l'avion, son propriétaire en avait ôté les instruments de bord. Ce qui nécessita de nombreux déplacements risqués sur place. Finalement, dans la nuit du 4 juillet 1941, Divoy et Donnet s'envolaient avec d'intéressants plans des aérodromes allemands de Belgique. A moins de 300 mètres des Allemands et sur un minuscule terrain d'envol... Moins de trois heures plus tard, ils atterrissaient dans l'Essex...

En 1951, dix ans après ce pied de nez audacieux à l'occupant, une pierre commémorant l'événement avait été dévoilée sur place. L'acte avait frappé les esprits : pour Camille Gutt, "l'exploit passera à la postérité comme le symbole même de l'indomptable caractère des Belges, de leur ingéniosité dans l'audace et de leur droit au respect de tous".
Une vision que ne partagent pas les militants flamingants qui depuis moult années badigeonnent le monument bilingue. Mais sous le maïorat précédent, de Jef Depré, la commune d'Overijse mettait son point d'honneur à restaurer la stèle. Ce n'est plus la position de son successeur Dirk Brankaer...

Guynemer reste français, même à Poelkapelle.

"De fait, explique Henri Branders, le président actuel des Evadés de guerre, quelle ne fut notre surprise de recevoir une lettre du bourgmestre nous annonçant que lors de sa réunion du 10 mars dernier, le collège avait décidé de faire enlever la plaque et de lui substituer désormais une seule inscription en néerlandais, arguant qu'Overijse se trouve en territoire flamand. Cette décision est d'autant plus effarante que je vais chaque année au monument Guynemer à Poelkapelle où personne n'a jamais contesté les inscriptions dans la seule langue maternelle du pilote français ! Mais le plus incroyable est que l'on s'en prenne aux victimes et pas aux auteurs des méfaits !"

Défense et illustration de Chamberlain

Néville Chamberlain, un homme maltraité par l'histoire.

Le site anglais vigoureusement eurosceptique Eureferendum est le reflet de ce que les insulaires offrent de mieux quand ils réfléchissent, même de mauvaise foi. Ils ont mis en ligne un intéressant post qui prend la défense de Neville Chamberlain, injustement invoqué, par la grâce des accords de Munich en 1938, quand il s'agit de dénoncer un gouvernement qui accepte des conditions léonines au détriment de ses principes et de ses intérêts à long terme.

Pourtant, les historiens savent très bien que Chamberlain n'avait pas d'alternative. Le Royaume-Uni n'était pas en conditions de se défendre encore moins d'attaquer l'Allemagne. C'est sous son autorité que le pays a lancé un programme de réarmement, freiné par deux facteurs négatifs, les syndicats et l'archaïsme de l'industrie.

Mais l'Angleterre de 1939 n'était pas celle de 1914. La déclaration de guerre à la suite des garanties offertes à la Pologne, encouragée en sous-main par le très belliciste F. D. Roosevelt, était prématurée. La France et le Royaume-Uni ne faisaient pas le poids face à la puissante industrie allemande. Il en est résulté la catastrophe de 1940. En dépit des rodomontades du pathétique Churchill, l'Angleterre aurait été obligée, tout comme Chamberlain l'avait prévu, de demander la paix à l'Allemagne en 1941 faute de pouvoir payer les importations indispensables à la poursuite de son effort de guerre. C'est l'entrée en guerre subreptice des Etats-Unis au printemps 1941 qui a sauvé la donné à Churchill. Le prix à payer par le royaume fut lourd : la perte définitive de sa capacité à décider de son avenir.

Voilà pourquoi le accusations portées par les eurosceptiques contre leur gouvernement à la suite de l'adoption du traité simplifié de Lisbonne sont impertinentes. Leur pays n'a plus de souveraineté à défendre depuis que Chamberlain n'est plus premier ministre. Churchill a fait de leur pays un protectorat virtuel des Etats-Unis.




Wouldn't be nice… if journalists wrote about what they knew? Well, all right, I can hear the objection to that. If they did that, the newspapers and magazines would be very thin, indeed.

So, here is another idea: how about them writing either about things they knew or about things they are prepared to find out about? That would add a page or two.

Today’s example is Andrew Gimson of the Daily Telegraph. Writing about Gordon Brown’s admittedly rather stupid comments about not letting the people of Czechoslovakia (no longer in existence) down by not “supporting” the Constitutional Reform Lisbon Treaty, Mr Gimson immediately reaches for the Chamberlain comparison, as, apparently some MPs did.

Frankly, I am sick of having Neville Chamberlain paraded as the ultimate in treacherous wickedness. What did the man do? He was, in domestic matters, rather a good politician but without, perhaps, the imagination required to deal with the likes of Chancellor Hitler or French Prime Minister Daladier.

However, he was not, unlike Stalin, really taken in by Hitler, as witnessed by the fact that rearmament was started under him, with some difficulty because of the constant opposition from the Labour Party and the trade unions, something that everyone forgot during the infamous “guilty men” electoral campaign of 1945.

In 1938, as Chamberlain knew, Britain was not ready for war (it is questionable how ready she was in 1940 but, at least, the time gained had been spent on rearmament and improvements, especially in the RAF). The Empire and Dominions would not support Britain as the leaders made it clear to the Prime Minister. It was not just the Establishment that was against the war, as Mr Gimson so foolishly asserts, but most of the population.

Precisely why was Chamberlain supposed to risk British lives in the services and in the cities, as it was believed by all that London and other cities would be rubble within days of a declaration of war, for a country that was far away and of which people did know little? Come to think of it, how much does Mr Gimson know about Eastern Europe now?

As it happens, even President Beneš did not think the country was worth fighting for as he never gave the order for the military to resist the German invasion of Sudetenland. Czechoslovakia was not that small a country, as it happens.

Its army was the third largest in Europe, after the French and the German ones. The mobilization of September 1938 produced an army of just half a million fewer than the German one, mobilized in August of that year. There was a well-developed military base.

One reason why Hitler wanted the Sudetenland was for the military armaments manufacture. Those Czech tanks were used a year later in the invasion of Poland and in 1941 in the invasion of the Soviet Union.

Imagine how different the history of the twentieth century might have been if the military and political leadership of Czechoslovakia had made a different decision in September 1938.

Nous invitons nos visiteurs à décourvir l'œuvre d'un des plus grands historiens anglais du XXe siècle : Corelli-Barnett.


Correlli-Barnett, un historien que les francophones se doivent de lire pour mieux comprendre l'Angleterre.

Collapse of British Power
Correlli Barnett
Methuen, 672 p., ISBN-10: 0413275809.

et aussi :

The Audit of War

The Lost Victory:
British Dreams, British Realities, 1945-1950



The Pride and the Fall: The Dream and Illusion of Britain As a Great Nation

vendredi 21 mars 2008

Quand le Fig Mag fait du merchandising, Minute fait du Journalisme

Saint-Exupéry, trop vieux pour voler ?

Le Figaro-Magazine est né voici trente ans, le 7 octobre 1978, de l'évolution du supplément hebdomadaire Figaro-Dimanche dont Robert Hersant, propriétaire du Figaro depuis 1975, avait confié la direction à l'écrivain Louis Pauwels. Sous la baguette de journalistes aguerris comme Jean-Claude Valla ou Patrice de Plunkett, on y trouvait des signatures connues : Jean d'Ormesson, Philippe Bouvard, Jacques Chancel, Jean-Jacques Gautier, François Chalais, Bernard Gavoty, François Nourissier, Jean-Marie Benoist, Jean-RaymondTournoux, Geneviève Dormann, Alain de Benoist, Jean-Louis Barrault, Joseph Losey, AnthonyBurgess, Marcel Julian, James de Coquet, Pierre Daninos, Sempé, etc.

La médication intellectuelle offerte par l'hebdomadaire était probablement trop roborative et, tête après tête, pour ne pas s'aliéner le puissant monde des publicitaires, Robert Hersant allait progressivement élaguer la rédaction de tous les éléments hétérodoxes pour ne conserver que des libéraux bon teint.

Le coup de grâce fut donné à la suite de l'attentat de la rue Copernic le 3 octobre 1980 qui suscita une violente campagne de la gauche contre le Figaro-Magazine, accusé, rien de moins, que d'être le responsable moral de cette attaque terroriste.

Jean-Claude Valla, épuré par Louis Pauwels
au nom de la normalisation et des recettes publicitaires,
a laissé un compte-rendu très personnel de ses années au Figaro-Magazine.


L'artisan de cette normalisation fut, paradoxalement, Louis Pauwels lui-même. Il abandonna son compagnonnage intellectuel avec les penseurs de la Rome antique pour se découvrir des affinités avec les Pères de l'Eglise. Le païen se fit chrétien et, à sa suite, le rédacteur en chef des pages culture, Patrice de Plunkett, a trouvé son chemin de Damas, au point que le batteur de hauts tambours de lansquenets s'est transformé en tambourineur du pape.

Depuis lors, le Figaro-Magazine a conforté sa place au soleil en privilégiant les photos aux idées et la forme au fond. Lu par une bourgeoisie replète, il est tout comme ses lecteurs, effrayé par les débats d'idées qui sortent de la lice autorisée par l'intelligentzia qui pense bien.

Ce robinet d'eau tiède débite sur papier glacé des banalités bien habillées de publicités et ses prétentions à l'information et à l'investigation (voir notre post d'hier) prêtent à sourire.

Le hasard fait que la semaine dernière, nous avons trouvé un superbe exemple de journalisme tel que le conçoit le Figaro-Magazine.


Quand le Figaro-Magazine donne une grande leçon de journalisme.


Raphaël Stainville signe avec ce papier un modèle du genre,
digne de figurer dans les manuels du parfait petit journaliste.

La nouvelle a fait le tour du monde. Une équipe de Rouletabille a découvert l'identité du pilote ayant abattu, le 31 juillet 1944, l'avion de reconnaissance piloté par Antoine de Saint-Exupéry.

Peu d'énigmes passionnent autant les Français que de connaître tous les détails de la mort de cet écrivain populaire dont le vigoureux antigaullisme est toujours passé sous silence.

En quelques heures, les journalistes ont fait le siège de la très compétente attachée de presse des éditions du Rocher pour obtenir, qui un exemplaire de l'opus, qui un entretien avec les auteurs (dont le très médiatique Jacques Pradel qui joue les augures matinaux sur les ondes d'Europe n°1).

Le Figaro-Magazine a obtenu les bonnes feuilles du livre et a demandé à son collaborateur Raphaël Stainville de rédiger un texte de présentation. En toute logique, ce journaliste aurait dû s'inspirer de la déontologie de la profession, récemment rappelée dans une tribune du Monde par la chanteuse Carla Bruni :

(…) l'objectif des articles est de présenter les faits aux lecteurs avec la plus grande rigueur et la plus grande honnêteté. Toute information doit être recoupée et vérifiée. La rumeur doit être bannie, la citation anonyme évitée et la source indiquée aussi précisément que possible
Soit Raphaël Stainville n'a pas lu le livre, ni le texte qu'il devait présenter, soit il ne accorde pas à la déontologie de la profession la place qu'elle mérite dans son travail quotidien.

Pourtant, quelques détails auraient dû attirer son attention. Il écrit que Lino von Gartzen est « un Allemand, spécialiste de l'histoire de la Luftwaffe ». Or, ce « spécialiste » est inconnu au bataillon. En réalité, il s'agit d'un plongeur sous-marin, passionné d'histoire de l'aviation, pas de quoi en faire un historien, ou encore moins un « spécialiste ».

Il aurait dû se poser la question que je me suis posée : « comment est-ce possible de connaître seulement aujourd'hui le titulaire d'une victoire aérienne ? » Un coup de fil au service historique de l'armée de l'Air aurait éclairé sa lanterne. Une victoire aérienne est très simple à attribuer dans le cas d'un duel aérien. Elle devient plus compliquée quand différents avions sont en jeu. Qui a tiré la rafale décisive ? L'attribution est dans certains cas impossible tant les intervenants sont nombreux. Ainsi, le responsable de la mort de Manfred von Richthofen le 21 avril 1918 demeure inconnu.

Pour faire court, Raphaël Stainville a pris pour argent comptant toutes les affirmations de Horst Rippert, relayées, magnifiées et mises en scène par le tandem improbable d'un locuteur radiophonique et d'un plongeur habile à nager dans les eaux troubles des médias. Pas un instant le doute qui l'a habité en lisant la Légende de Novgorode, le poème attribué à Blaise Cendrars, et qui l'a conduit à découvrir qu'il s'agirait d'un faux, n'est revenu cette fois titiller ses neurones.



Quand le Fig-Mag sert la soupe,
Minute enquête


Il est paradoxal que le seul organe de presse à faire son travail dans cette affaire est le petit poucet de la presse française, un paria que l'on lit mais que l'on ne cite pas : Minute, le France-Dimanche du monde politique.

Dans le numéro en vente cette semaine, Patrick Cousteau donne en trois pages une belle leçon de journalisme, non seulement à Raphaël Stainville, mais aussi à toutes les grosses pointures de la presse qui ont servi de caisse de résonance aux thuriféraires de l'imposteur Horst Rippert.

Pour commencer, Patrick Cousteau a cherché à en savoir plus. Il a fouillé le passé de Horst Rippert et découvert que ce pilote, reconverti dans le journalisme, s'est dans le passé déjà fait passer pour un autre. Rien de moins que pour le frère d'Hans-Rolf Rippert, alias Ivan Rebroff, le chanteur bien connu des années 1960 et 1970.

Cette mythomanie va au-delà des liens de famille avec un chanteur à héritage. Horst Rippert affirme qu'il est titulaire de deux prestigieuses décorations, la croix de chevalier de l'ordre de la Croix de fer, la fameuse Ritterkreuz, et la Croix allemande (ou » œuf sur le plat »). Rien de plus simple que de vérifier si son nom apparaît sur les listes des titulaires de ces décorations.

Patrick Cousteau a fait mieux, il a retrouvé la feuille des états de service de Horst Rippert. On y apprend qu'il est titulaire de la Croix de fer de première classe, ce qui n'est pas si mal, et qu'il a fini la guerre adjudant et non pas lieutenant comme il le prétend.

Le palmares de Horst Rippert est indiscutable.

Son palmarès est quant à lui indiscutable. Il a abattu un minimum de 18 avions ennemis. En revanche, Minute démontre qu'aucune victoire n'est inscrite à ce palmarès entre le 25 et 26 juillet (deux B-24 abattus, voir document ci-dessus) et le 7 août. Or si les pilotes tiennent bien à quelque chose, c'est à une comptabilité précise de leurs victoires, passeport pour leurs promotions, décorations et autres bonifications.

Minute a pris son téléphone pour interroger les spécialistes, notamment ceux du Service historique de l'armée de l'Air. La réponses sont claires comme de l'eau de roche : les registres de l'unité de Horst Rippert sont parfaitement tenus. Un Lightning a bien été abattu, mais le 30 juillet. En revanche, le lendemain, le jour de la mort de Saint-Ex, aucune victoire n'est comptabilisée, aucun combat mentionné.

Plus charitable, le colonel C.-A. Gavoille, ancien pilote de chasse et filleul de Saint-Ex, estime que son collègue de la Luftwaffe confond les dates et rappelle que sur l'épave retrouvée on ne voit pas d'impact de balles. Pour lui, un accident est l'explication la plus probable.

Patrick Cousteau a tenté de joindre Hors Rippert mais la famille n'a pas voulu faire suivre l'appel. Et l'hebdomadaire de le regretter :

Nous aurions peut-être appris qu'il était le frère de Saint-Exupéry et qu'il avait descendu un avion piloté par un chanteur russe, sur ordre de son ami le maréchal Goering.
Il est triste de constater que si la presse avec une rare unanimité a répandu urbi et orbi les délires d'un vieil homme passablement gâteux, il n'en sera pas de même avec les mises au point des historiens recueillies par Minute.

Les journalistes n'aiment pas être surpris la main dans le pot de confiture, encore moins par ceux qu'ils méprisent au point de feindre ignorer leur existence.

Esprit de caste, quand tu nous tiens…















jeudi 20 mars 2008

Le Fig-Mag fait sa pub

Dans le Figaro quotidien, Marie-Laetitia Bonavita et Enguerand Renault en font des tonnes sur la future formule de leur confrère et rival le Figaro-Magazine. Nous verrons demain que ce magazine a beaucoup à apprendre sur le plan de l'information et de la rigueur du travail de journaliste.


Alexis Brézet et son équipe travaillent depuis plusieurs semaines pour créer une maquette plus attrayante qui fait la part belle à l'actualité, au reportage et à l'art de vivre.
Pour ses 30 ans, l'hebdomadaire veut raviver le «plaisir d'informer».
«Le Figaro Magazine» fête ses 30 ans. Pour célébrer l'événement, les trente photos «les plus fortes» publiées dans l'hebdomadaire au cours de sa vie seront exposées sur les grilles du Sénat, du 15 avril au 15 juillet. «Mais il ne s'agit pas d'un regard en arrière. Le Figaro Magazine va s'offrir, pour son bel âge, une nouvelle jeunesse», précise Alexis Brézet, directeur de la rédaction du titre, qui travaille depuis des semaines avec Étienne Mougeotte, nommé fin novembre à la tête des rédactions du groupe Le Figaro, à la nouvelle formule du magazine qui verra le jour dès vendredi prochain.

Ce toilettage passe par un logo plus aéré et une nouvelle maquette, conçue par le nouveau directeur artistique Joseph Maggiori, qui est à l'origine de l'actuelle identité visuelle de L'Express. Il touche aussi au fond de l'hebdomadaire haut de gamme du week-end. «Nous approfondissons le concept éditorial qui fait le succès du magazine depuis son lancement, c'est-à-dire un tiers d'actualité, un tiers de reportages et un tiers de culture et d'art de vivre», poursuit Alexis Brézet. En clair, privilégier l'actualité pour le «plaisir d'informer», comme le clame la nouvelle devise du magazine. D'ailleurs, de grandes signatures familières au journal, comme Jean d'Ormesson et Marc Lambron, seront régulièrement sollicitées. Des plumes du Figaro, telles Éric Zemmour, Anne Fulda et Frédéric Martin-Bernard, tiendront des rubriques hebdomadaires.

Des débats

Le magazine continuera à ouvrir sur trois doubles pages de photos qui font la signature du titre, puis enchaînera sur une succession de pages de confidentiels sur des événements ou des personnes, favorisant le zapping cher aux lecteurs. «À cette levée de rideau» succédera une double page sur un débat opposant deux personnalités sur un sujet d'actualité. «Une façon de montrer que nous sommes ouverts à la confrontation des idées», souligne Alexis Brézet. Suivra ensuite une série de reportages ou enquêtes illustrés, faisant vivre l'actualité ou les événements culturels qui seront à l'affiche (expositions, films…). De même, des reportages touristiques rejoignent cette rubrique du centre du journal. La troisième partie, tournée vers la culture et l'art de vivre, jouera sur le côté pratique d'un guide pour les sorties, la littérature, la mode ou la gastronomie.

mercredi 19 mars 2008

Editions Atlas : peut mieux faire


Les éditions Atlas ont un savoir-faire incontesté dans le domaine de l'édition grand-public. Elles adaptent avec beaucoup de talent et de professionnalisme des productions étrangères et réalisent de bons ouvrages autochtones. Ses gestionnaires pratiquent à la perfection l'art de réchauffer les restes et de les resservir en changeant le décor, de sorte que le public accueille avec faveur la réédition. Rien à redire dans des pratiques qui sont celles de l'édition industrielle car Atlas met un point d'honneur à proposer des ouvrages de qualité, bien illustrés et dont la mise en forme éditoriale est parfaite.

Toutefois, au vu de son dernier né, on est en droit de se demander si cette perfection n'est pas à conjuguer au passé.

La nouvelle collection qui est en vente cette semaine, Passion de l'Egypte, propose des volumes reliés de 128 pages au prix très attractif de 0,99 euro. Les suivants seront vendus à 2,99 euros puis au tarif définitif de 5,99 euros. C'est en principe une bonne opportunité pour ceux qui aiment la civilisation égyptienne de commencer une collection de petits livres faciles à lire tirés d'une encyclopédie éponyme. L'offre commerciale est attractive et, probablement, de nombreux lecteurs se laisseront séduire par cette proposition. Ils n'auront pas à la regretter.

En revanche, on peut s'interroger sur l'absence des critères de qualité éditoriale qui ont fait jadis la réputation de cette maison d'édition. Je possède à côté de ma table de travail des encyclopédies Atlas qui me rendent un grand service, prenons par exemple le Million, Découvreurs et conquérants, l'Encyclopédie des armes, Troupes d'élite, différentes encyclopédies d'aviation, de jardinage et de cinéma. Ces titres ont été conçus pour un large public mais ils sont aussi de vrais outils de référence, parfaitement relus, corrigés et respectueux du code typographique. On peut prendre au hasard un page, la liste des crédits photographiques ou encore l'ours, et on peine à trouver une erreur.

Certes, cette perfection a un prix. Mais que dire de ce produit éditorial au rabais consacré à l'Egypte ?

La simple lecture de l'ours permet de découvrir que le suivi éditorial n'est pas digne d'une grande maison : la typographie est bancale et la ponctuation fautive, les amateurs trouveront même un parenthèse ouvrante qui pleure sa compagne. Quant au crédit photo, un autre critère de qualité, une illustration créditée D.R. (droits réservés, l'éditeur met de côté le montant de droits à payer pour cette illustration en attendant que le possesseur légitime se manifeste) à une page, trouve un propriétaire à une autre. C'est le cas de la photo illustrant chaque ouverture de chapitre, reproduite et créditée à la page 52.

Sans juger sur le fond, car mes compétences limitées sur cette période de la civilisation ne le permettent pas, le texte n'a pas reçu la mise en forme qu'il mérite. Je suppose que l'éditeur a dû confier la réalisation de ces pages à un studio peu au fait des subtilités de la typographie. Peut-être que ce studio se trouve en Chine, comme les ateliers où ce premier volume a été imprimé. Pire encore, personne aux Editions Atlas ne semble avoir lu le livre avant de l'envoyer à l'impression (pourtant la liste des noms des personnes qui seraient intervenues dans cette collection est longue comme un jour sans pain, du P-D G aux responsables d'édition).

Sans vouloir être exhaustif, il est agaçant de trouver à la fois des guillemets français et anglais, en fonction de la fantaisie du moment, des mentions de siècle (ou l'ordinal d'un monarque) qui ne sont pas mises en supérieur, l'absence de quadratins pour signaler un début de paragraphe, un chiffre commençant non seulement une phrase… mais un paragraphe, le non respect des italiques pour signaler le titre d'une œuvre ou le nom d'un navire, une gestion des blancs qui est tout sauf typographique, avec des lignes horribles comme à la page 15, ou même des espaces précédant un point final! Dans des encadrés, on trouve des textes en drapeau mal équilibrés et comportant des coupes de mots. Comme si le maquettiste avait effectué un copier-coller depuis une autre mise en page sans en vérifier le résultat.

Les légendes sont un autre point faible de l'ouvrage. Le texte nous indique à la page 17 qu'il existe une seule pyramide rhomboïdale en Egypte : la pyramide Brillante du Sud. Au verso de cette page, nous trouvons une gravure du XIXe siècle représentant une pyramide rhomboïdale mais le rédacteur omet de nous citer son nom. Il n'est pourtant pas difficile à trouver. Il suffit de lire le texte ! A une autre page, sur un fond de pyramide, le lecteur découvre une jolie figure représentant un personnage assis. La légende ne cite que le nom d'un pharaon. Or il s'agit en réalité de l'architecte Imhotep. Comment le lecteur peut-il le deviner ?

L'ouvrage mérite mieux que sa typographie calamiteuse et son texte relu à la va comme je te pousse. Il est d'un accès facile et aborde les différents sujets (comme les méthodes de construction des pyramides) avec impartialité et aisance.

Il aurait été beaucoup mieux qu'à l'ours de cette encyclopédie il y ait moins de directeurs, moins de responsables d'édition et, qu'en revanche, on y trouve un correcteur, un tout simple, tout unique et tout irremplaçable correcteur. Pour un coût modique, les principaux défauts de cette collection auraient été corrigés pour le plus grand plaisir des lecteurs.

Il est dommage que la politique d'économies de bout de chandelle de l'éditeur conduise à cette absence regrettable.