Mathieu de Taillac, journaliste français en Espagne.
Peut-on rendre compte de la complexité espagnole à des médias conformistes ?
Un exercice difficile que ce jeune professionnel ne maîtrise pas encore à la perfection.
Peut-on rendre compte de la complexité espagnole à des médias conformistes ?
Un exercice difficile que ce jeune professionnel ne maîtrise pas encore à la perfection.
Peut-on être un bon correspondant quand on travaille pour un média conformiste et politiquement correct ?
C'est la question que l'on peut légitimement se poser après avoir écouté le sujet concocté par Mathieu de Taillac pour l'émission Et pourtant elle tourne du jeudi 13 mai dernier sur les ondes de France Inter consacrée au juge Garzon.
Sans entrer dans le détail de l'affaire, car cela est impossible dans un média étranger, Mathieu de Taillac a traité le sujet sous un angle très favorable à Garzon et à ses défenseurs de la gauche et de l'extrême-gauche espagnole hostiles au régime constitutionnel.
Au cours de l'émission, non seulement il a omis des faits importants sur l'affaire, mais il s'est bien gardé de corriger des affirmations manifestement fausses.
Un des leitmotiv du reportage est la notion de « passé franquiste refoulé ». On peut se pincer en entendant ce type d'affirmations quand on sait l'omniprésence de la version noire du franquisme tant dans le monde de l'édition que dans ceux des médias ou de l'université.
Le seul passé refoulé en Espagne est celui des crimes commis par le Front populaire et ses soutiens, non seulement au cours de la guerre civile mais depuis sa tentative de coup d'état en 1934.
Les extraits sonores sont dans leur majorité ceux de partisans du juge comme celui de Pedro Vicente qui nous explique que son grand-père a été fusillé sans motif en 1936 tout comme deux mille autres personnes à Merida, en Extremadure.
Le journaliste n'intervient à aucun moment pour rappeler à ses auditeurs français que de nombreux autres Espagnols, et aussi dans la même région que le grand-père de Pedro Vicente, ont été fusillés par le Front populaire sans plus de raisons.
De même, quand la romancière Rosa Ragas déclare sans ambages que la Falange est responsable de la majorité des crimes commis en Espagne, l'auditeur informé en reste sans voix tout comme Mathieu de Taillac qui aurait dû ici rappeler quelques notions de base.
Mais visiblement, Mathieu de Taillac ne connaît pas bien l'histoire d'Espagne ou bien il ne veut en connaître que la version en usage chez ses amis. A titre d'exemple, j'ai entendu durant l'émission que la Falange était le parti unique sous Franco !
Cette contre-vérité est stupéfiante et révèle une ignorance sidérale qui sied bien mal à un correspondant en Espagne. Nous pouvons que lui conseiller de combler ses lacunes au plus vite, sans se fier aux conseils de lecture de Rosa Regas.
Un meilleure connaissance de son sujet lui aurait interdit de commettre un autre sérieux impair. Quand il évoque les insultes contre Santiago Carrillo, il omet tout simplement de préciser que ce chef communiste est un des responsables de la pire des tueries de la guerre d'Espagne, les massacres de Paracuellos del Jarama où le Front populaire a fusillé des hommes, des femmes et des enfants suspects de sympathies droitières.
Mathieu de Taillac aurait pu ajouter, en plein dans son sujet, que Baltasar Garzon avait refusé d'enquêter sur les crimes imputés à Carrillo au nom des lois d'amnistie que plus tard il écartera pour enquêter sur les crimes du franquisme.
C'est là le principal point faible de Garzon, sa partialité. Avoir refusé d'enquêter sur les crimes d'un camp pour ne s'intéresser qu'à ceux de l'autre camp.
Mathieu de Taillac n'a pas un rôle facile. Au micro de France inter il a mentionné en passant que Garzon était impliqué dans deux autres affaires. Pourquoi n'a-t-il pas expliqué que dans une il est soupçonné de corruption au profit de la banque Santander et que dans l'autre il est accusé d'avoir mis sur écoute les conversations entre des mis en examen et leurs avocats ?
Peut-être parce qu'il sait quelles sont les limites à ne pas franchir.
Selon les médias, il doit graduer les révélations afin de ne pas heurter les sensibilités de ses clients. Un portrait trop négatif de Garzon, cette sainte icône de la gauche bobo, n'aurait pas été de bon augure pour la poursuite de sa collaboration rémunérée avec la radio porte enseigne du conformisme idéologique en France.
Souhaitons que cette prudence de Mathieu de Taillac soit le reflet d'une préoccupation purement mercantile et non pas le résultat d'oeillères idéologiques.
5 commentaires:
Vous auriez pu ajouter que durant l'émission de France inter, un des magistrats de gauche venu à son secours avait avancé quelques solides arguments juridiques en faveur du magistrat.
Oui, c'est vrai, j'oublié d'en parler. Je l'avais pourtant noté. Mea culpa.
La loin d'amnistie étant antérieure à la constitution, elle peut être considérée comme une loi franquiste et le juge peut aussi très légitimement avancer qu'elle est en contradiction avec la doctrine de l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité.
En effet, ce sont des arguments intéressants.
Mais alors, on revient à nouveau à la partialité de Garzon.
Pourquoi avoir poursuivi Pinochet mais refusé de poursuivre Castro ?
Pourquoi avoir voulu enquêter sur les crimes de Franco, un homme mort voici plus de trente ans, et refusé d'enquêter sur les crimes de Paracuellos commis par Santiago Carrillo qui est toujours en vie ?
Dans le paysage désastreux des journalistes français en poste en Espagne, Mathieu de Taillac n'est pas un mauvais cheval. Je l'ai écouté sur France Inter parler des problèmes du foot en Espagne et il s'en est plutôt bien tiré.
Ce garçon semble être le reflet de son milieu. De toutes les façons, il n'avait aucune chance de surivre s'il avait fait preuve d'originalité.
Toutefois, je peux comprendre que son conformisme pesant, parfois proche de la novlangue, peut se révéler assommant pour un auditeur qui connaît bien la vie politique espagnole et qui ne se contente pas de suivre la ligne éditoriale fixée par El Pais.
On ne peut pas reprocher à de taillac d'être conformiste et de gauche. Il partage le profil sociologique de la majorité de la sous-classe prolétarisée des journalistes.
A côté de ses confrères français de Madrid, je ne parle pas de la belle Diane (pour laquelle Balbino Katz semble faire preuve d'une indulgence coupable), mais plutôt de ses confrères de l'AFP, Mathieu de Taillac est une lumière.
Arrêtez donc de lui taper dessus !
Mathieu de Tailac vient d'écrire pour le Figaro un article affligeant intitulé "La peur règne à Mondragón, fief nationaliste basque". Il nous présente cette ville du Guipuzcoa comme "marquée par la terreur et le sang" et ne recule devant aucun cliché: les graffitis favorables à ETA, l'omerta, blablabla. C'est caricatural, sans nuance, et en fait très loin de la réalité.
Venir de Madrid pour écrire autant d'inepties: au moment où le nationalisme basque condamne (enfin!) la violence et le terrorisme sans aucune ambigüité, on peut raisonnablement se demander ce qui a motivé l'écriture de cet article.
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