dimanche 28 décembre 2008

Quand les nazis bombardaient Paris en 1943 !

1939-1945
Jour après jour


Jacques Privé

Grancher, 410 pages, ill., annexes, 32 euros, ISBN 978-2-7339-1060-3.

Je suis habitué à lire des âneries, mais parfois les bras m'en tombent et, avec eux, le livre que je suis en train de parcourir. C'est d'autant plus triste que l'idée qui sous-tend l'ouvrage n'est pas mauvaise et qu'elle peut se révéler d'une grande utilité pour des étudiants. J'en suis d'autant plus navré que les éditions Grancher publient des ouvrages souvent courageux et à contre-courant.

D'un format assez grand, bien relié et à couverture souple, illustré avec intelligence (dont nombre de photographies peu connues), l'ouvrage rassemble de manière synthétique une chronologie du conflit en insistant sur le théâtre des opérations européen. La guerre dans le Pacifique existe à peine. L'auteur cite l'attaque de Pearl Harbour mais pour le reste, bernique ! Signalons en passant que dans le livre coexistent deux graphies pour la base américaine. On trouve également Pearl Harbor.

Le principal reproche que l'on peut faire à cet ouvrage est de mêler information et commentaire et d'utiliser un choix de termes qui pouvait se justifier dans la France des années 1950 mais qui aujourd'hui révèle une approche archaïque de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale.

Nous trouvons aussi quelques grosses erreurs que j'ose espérer sont le fait de l'éditeur et non de l'auteur. Par exemple, la légende de la page 263 où un cortège funèbre de victimes d'un bombardements de la région parisienne en 1943 attribué à « l'armée nazie ». Même erreur à la page 230. Il faut le faire ! Autres perles : « membres des Brigades internationales » en février 1939 réfugiés sur une plage à Argelès-sur-Mer. Las, les brigadistes ont quitté l'Espagne en octobre 1938. « La Provence est libérée par de Lattre de Tassigny en 1944 » Et les Anglo-Américains, ils ont fait de la figuration ? « Les villes des côtes normandes et bretonnes sont libérées une à une au cours du mois de juin [1944] » Ah bon ? Brest, libéré le 18 septembre, Le Hâvre, 12 septembre, Nantes, le 12 août… « Le général F.E. Reinhardt [E.·F] échange une poigne de mains avec un général soviétique non identifié. » En réalité, il suffit de regarder la photo pour constater qu'il ne s'agit pas d'un général américain. Selon la presse de l'époque, on peut avancer qu'il s'agit du lieutenant William Robertson et son homologue Alexander Silvasko. En revanche, les archives suggèrent plutôt le nom du 1st. Lieutenant Albert L. Kotzebue.

Au fil des pages on trouve des détails intéressants dans un style qui est celui de l'amateur d'histoire et non pas de l'historien. Par exemple, l'abus du terme « nazi » employé à tort et à travers dans tout l'ouvrage. Albert Speer et Arno Breker sont pour l'auteur des « architectes nazis ». Breker n'est pas architecte, mais en revanche tous les deux deux sont membres du NSDAP. Est-ce cette précision que voulait signaler Jacques Privé ou bien une marque d'opprobre ? Mais aussi une foule d'affirmations non sourcées qui induisent le lecteur en erreur. Comment écrire sans plus de détails que des « officiers supérieurs de l'Abwehr ont fourni des clefs de décryptage d'Enigma » ?

Des erreurs mineures révèlent un manque de profondeur dans l'érudition de l'auteur, du nom d'une maison close à Paris le One Two Two et non pas le One to Two, le fait que Darland n'était pas en poste à Alger en novembre 1942, mais seulement de passage pour voir son fils malade, von Rundstedt et non pas Von Runsted, etc.

La bibliographie livre l'explication de cet étrange méli-mélo. On trouve le meilleur, Azéma, Pierre Rigoulot, Robert Paxton… Mais surtout le pire : Jacques Attali, Philippe Aziz, Christian Bernadac, Paul carell, Jacques Delarue, Ladislas de Hoyos, Pierre Miquel, Gilles Perrault, Bertrand Poirot-Delpech ou l'inénarrable Jean Ziegler.

Faute de discriminer dans ses sources, de vérifier ses informations, il était fatal que l'auteur propose un ouvrage inspiré par de bonnes intentions mais où fourmillent les erreurs dont certaines de la taille d'un éléphant. On peut regretter que l'éditeur n'ait pas fait l'indispensable travail de vérification qui devrait être le sien.

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