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lundi 15 décembre 2008

Le super TGV de Hitler

Sur cette illustration d'époque on peut comparer les dimensions d'un train normal (au premier plan) avec celles du projet de super TGV à la dimension du continent européen.


A un moment où les pays européens se lancent dans de grands travaux (dont de nouvelles lignes de train à grande vitesse), souvenons-nous de cet incroyable projet imaginé par les chemins de fer hitlériens d'un super TGV à la dimension du continent. Ces images sont très peu connues te méritent qu'on le sorte de l'oubli.


L'ébauche du réseau imaginé par le régime hitlérien.


L'objectif principal du régime était d'intégrer les nouveaux territoires de l'est conquis par la Wehrmacht à l'économie du Reich.

Un compartiment de première classe.

Un wagon restaurant aux dimensions impressionnantes.

Les marchandises ne sont pas oubliées. A cette époque, le conteneur et la palette n'ont pas encore été inventés.

mercredi 16 avril 2008

Bunker à vendre

Le bunker était une usine d'assemblage.

Le Spiegel publie un article typique de la presse ouest-allemande où le journaliste Michael Fröhlingsdorf se gausse de la mégalomanie de Hitler, accusé d'avoir construit un bunker destiné à l'assemblage des sous-marins qui n'a jamais servi.

Cette critique est assez stupide car le gouvernement allemand avait conçu un brillant plan de production de sous-marins de nouvelle génération (type XXI) qui distribuait la construction des différents tronçons des navires dans tout le pays et réservait seulement leur assemblage final en un point près de la mer.

Pour que cet assemblage ne soit pas perturbé par les bombardiers anglo-américains, le plan prévoyait la construction d'un important abri bétonné pouvant accueillir l'assemblage de quatorze bâtiments type XXI simultanément.

Le 27 mars 1945 il a fait l'objet d'une importante attaque aérienne où furent utilisées de bombes Grand Slam (voir petit film ci-après) mais il était trop tard pour que cette installation ait un rôle dans l'issue de la guerre.

Parmi les milliers de travailleurs forcés et prisonniers qui ont été mobilisés pour la construction de ce site, on compte une trentaine d'Irlandais, capturés à bord de navires britanniques. Ils furent finalement retirés du chantier à la demande de la Légation irlandaise à Berlin. C'est au nom des quelques morts irlandais (sur un total d'environ quatre mille) que ce petit pays est un des avocats les plus actifs de la transformation du lieu en mémorial.


What to Do with Hitler's Submarine Bunker?

The submarine bunker is gigantic -- and expensive. A World War II-era military facility is slowly succumbing to the elements, and nobody seems willing to pay for its upkeep. In fact, the German armed forces has offered it up for sale.

By far the largest object in the rather odd real estate catalogue carries the number 220039 on the Web site of Germany's armed forces, the Bundeswehr. It is nestled about midway down the long list of property bargains, part of the Bundeswehr's project of shutting down hundreds of unneeded facilities. One can make offers on storage tanks, training camps, barracks and former weapons depots.

But number 220039 is different. The "Materiel Depot Wilhelmshaven -- TE Bremen" is a dark gray cement colossus -- 426 meters (1,398 feet) long, 97 meters wide and 25 meters high. The ceilings are up to 7 meters thick. Indeed, the structure is so cavernous that even an institution as large as the German armed forces is only able to occupy a third of it. The rest lies empty -- as it has since the end of World War II.

The structure is left over from one of the most megalomaniacal projects of Adolf Hitler's Nazi dictatorship: the submarine bunker named "Valentin." Some 12,000 prisoners of war, concentration camp inmates and forced laborers constructed the bomb-proof submarine factory from 1943 to 1945. An estimated 4,000 of the slave workers didn't survive to see the project's completion.



Excesses of the Nazis

Now the military wants to get rid of the site, and the current search for a buyer has become Exhibit A in an absurd dispute between the state of Bremen and the federal government in Berlin. For months, the two sides have quarrelled over whose budget should pay for expensive maintenance work and upkeep.

Since the mid-1960s, the bunker has been used by the German military as cheap storage. Nowadays, though, the facility is spooky in its emptiness. Just six soldiers and 24 civilians are responsible for guarding the mostly empty space. The only life comes from the 10,000 annual visitors who file through its echoing halls.



But such limited use is hardly efficient. Each year, the facility costs taxpayers an estimated €700,000 ($1.1 million) to €800,000. "And that is only for the most necessary of expenses," says Wolfgang zu Putlitz, who is in charge of the facility.

The results are clear to all: Unused parts of the bunker are crumbling and can no longer be visited. Signs warn that bits of the ceiling may fall. German Defense Minister Franz Josef Jung says he is aware of the bunker's "unique importance." But, he goes on, the German military is not in the business of maintaining historical monuments.



Waiting for a Buyer

The Finance Ministry, which is normally responsible for federally owned properties, likewise denies authority. The bunker, says Ministry deputy Karl Diller, still belongs to the military after all. And in any case, he adds, it should be Bremen's responsibility -- states, he points out, have jurisdiction for cultural sites like memorials.



Bremen, though, is not exactly swimming in extra money. The city(which has the status of a state) has no desire to cough up for the World War II facility. "The bunker belongs to the federal government," says Bremen Mayor Jens Böhrnsen, "and for financial and ethical reasons it should not be sold."

The mayor says his city-state would have no problem contributing to the development of a concept for the memorial site. But Bremen, he says, simply can't afford the site's restoration and maintenance.


The only possible savior for the site is Federal Commissioner for Culture Bernd Neumann. He is, as it happens, also head of Bremen's Christian Democratic Union party and is currently in negotiations with all German states to create a nationwide framework for sites of commemoration. But Valentin has so far not been made a talking point.

On Tuesday, Mayor Böhrnsen visited the bunker together with his cabinet in order to raise awareness of the site's deteriorating condition and provide symbolic support for its conversion into a memorial site. But so far, no one has come forward with the money. And article number 220039 continues to wait for a buyer.



Le Grand Slam en action

mardi 8 avril 2008

Allumez le feu !

La flamme olympique a été mise en scène pour la première fois à Berlin en 1936.

Les tribulations récentes de la flamme olympique dans son parcours urbain dans les pays occidentaux a remis en mémoire les origines méconnues de cette pratique.

Dans les colonnes de l'Independent, un des meilleurs quotidiens de la gauche bien pensante européenne, le journaliste Andy Smith pousse le bouchon un peu loin en réduisant la flamme olympique à un vulgaire rituel nazi.

A juste titre elle rappelle que l'idée de confier à des relais de sportifs le transport de la flamme entre Olympie et le lieu des jeux est le fruit de l'imagination fertile de Carl Diem, chargé par le gouvernement allemand, avant l'arrivée de Hitler au pouvoir, d'organiser les Jeux à Berlin.

Carl Diem en compagnie de son épouse lors des jeux de 1960.

Il eut notamment l'idée de confier l'allumage de ce feux sacré sur le site des temples d'Olympie à la force des rayons du soleil, concentrée à l'aide de miroirs mus par la blanche main de prêtresses antiques.

L'arrivée de la flamme à Berlin en 1936.

Depuis cette date, les intellectuels de gauche qui détestent le sport en général et les Jeux olympiques en particulier, ne manquent pas une occasion de dénoncer cette compétition internationale, exhibition selon eux d'une vision du monde élististe et raciste.

La cinéaste Leni Riefenstahl fut chargée de tourner Olympia, le film des jeux de Berlin 1936. On la voit ici après la guerre en reportage au Soudan.

On a un bon exemple de cette mentatilté sectaire avec l'ouvrage de John M. Hoberman : l'Universalisme olympique et la question de l'apartheid dont on trouve ici une recension très favorable aux idées de l'auteur.

Extrait :

Cette interprétation des Jeux de Berlin cache mal le fait que la combinaison puissante du sport de Coubertin — la compétition internationale, le rituel païen et le culte du corps — avait longtemps fait appel aux mâles allemands enclins au sport pour qui le nationalisme völkisch [populaire] et la perspective militaire de l’aile droite étaient tout à fait compatibles avec le service dévoué au mouvement olympique et au régime nazi. La carrière olympique de Carl Diem, qui s’étira sur un demi-siècle, des Jeux de Stockholm en 1912 jusqu’à sa mort en 1962, est un cas d’espèce. Les prises de position de Diem comme humaniste allemand et internationaliste olympique étaient en parfait accord avec un profond et ardent désir de l’imperium allemand promis par Hitler, comprenant un mouvement olympique administré par les nazis (41). Disciple dévoué de Coubertin, Diem a servi le régime nazi du début à la fin du Troisième Reich. L’ami de Diem, Walter von Reichenau, avait voyagé avec lui aux États-Unis en 1913 pour étudier le sport américain. Comme l’un des généraux les plus puissant d’Hitler, et célèbre pour ses prouesses sportives, von Reichenau devint membre du CIO en 1938. Comme général et commandant en chef de la Sixième Armée allemande « pendant la campagne russe de 1941, il devait donner un ordre de mission d’une triste notoriété trouvant des excuses pour le prodigieux massacre de Juifs que les SS effectuèrent à Kiev (42) ». Il est tout à fait possible que sa mort en 1942 épargna au CIO la honte de voir l’un de ses membres mis en jugement à Nuremberg. Karl Ritter von Halt, membre du CIO de 1929 à 1964, fut le dernier « Reichssportführer » d’Hitler et membre des SA (43). Lorsque les Jeux olympiques d’hiver se tinrent à Oslo en 1952, les Norvégiens ne voulurent même pas le laisser entrer dans le pays.

Les amateurs éclairés peuvent refaire le parcours de la flamme sur cette version du jeu Monopoly publiée en Allemagne en 1936.

Ces antécédents montrent le contexte historique plus vaste dans lequel le mouvement olympique demeura une expression de cette « idée de l’Europe » qui, de 1940 à 1945, pris la forme d’un « Nouvel Ordre » nazi en Europe. Comme le faisaient de semblables serviteurs de l’empire nazi pour la littérature ou la musique, Carl Diem travailla à amener « la réorientation du sport européen (44) » à l’intérieur du nouvel imperium. Après 1945, il poursuivit tout simplement sa mission à l’intérieur du contexte plus vaste d’un mouvement olympique alors au-delà du contrôle d’Hitler.

En dépit des recherches pionnières (45), largement inconnues en dehors de l’Allemagne, de l’historien ouest-allemand Hans-Joachim Teichler, l’axe franco-allemand qui contrôlait le mouvement olympique durant la plus grande partie des années 1930 reste peu compris. Coubertin lui-même était au centre de cette relation, courtisé et trompé par les opérateurs allemands, y compris Carl Diem, déjà sincèrement attiré par sa propre idée de la nouvelle Allemagne et le spectacle de l’Olympiade de Berlin. Ce fut le ministère des Affaires étrangères de Hitler qui proposa Coubertin pour le Prix Nobel de la paix, le gouvernement d’Hitler qui lui donna 10 000 reichsmarks, et Hitler lui-même qui reçut une lettre de remerciements de Coubertin (46).

Mais l’Olympiade de Berlin doit seulement être entendue comme l’épisode le plus dramatique à l’intérieur d’un système politique plus vaste poursuivi pendant les années trente par des agents nazis comme Otto Abetz, plus tard ambassadeur d’Allemagne en France occupée, en association avec des fascistes français et d’autres éléments d’extrême droite qui attendaient avec impatience un Nouvel Ordre en Europe. Pour ce réseau franco-allemand, l’Olympiade de Berlin était à la fois l’accomplissement politique et esthétique d’une Internationale fasciste naissante et la meilleure façon de se faire une place parmi les célébrités en Europe. Au moment de sa mort en 1937, Coubertin avait atteint le statut d’icône pour le Comité France-Allemagne, un groupe précurseur représenté par Abetz (47). Un an plus tard, le Comité et ses homologues allemands inaugurèrent un buste de Coubertin à un « congrés culturel » tenu à Baden-Baden (48). Cette cérémonie couronna une décennie d’efforts de la part d’Otto Abetz et d’autres pour servir leur propre forme de « réconciliation franco-allemande » dans l’intérêt de la politique étrangère allemande. Cette campagne « fraternelle » parrainait les fêtes bilatérales d’étudiants et les réunions d’anciens combattants (49). L’attachement au sport et « le culte du muscle (50) » devinrent les caractéristiques définissant ce mouvement et le fascisme français lui-même. Qui plus est, ce modèle sportif avait attiré une caste internationale d’adhérents vers le mouvement olympique dès le tournant du siècle. Bien qu’il eut l’intuition du potentiel charismatique de la haute performance sportive, Coubertin ne pouvait pas prévoir les conséquences de cet auto-recrutement, y compris la cooptation du mouvement olympique par les symphatisants nazis tel Carl Diem, sa propre approbation publique (et rendue publique) des « Jeux olympiques nazis », et le recrutement d’un américain germanophile nommé Avery Brundage — ami de Carl Diem et de Karl Ritter von Halt — dans l’appareil de propagande nazi (51).

L’Olympiade de Berlin démontra que quatre décennies de recrutement dans le mouvement olympique avaient préservé la pensée eurocentrique au sujet de la race à l’intérieur du CIO. À cet égard, la dimension multiraciale des Jeux de Berlin, avec les victoires de Jesse Owens en vedette, fut et demeure profondément trompeuse. Aucune évaluation du mouvement olympique durant les années trente ne peut oublier l’accueil enthousiaste accordé à l’olympisme par des internationalistes proches des nazis comme Carl Diem, Otto Abetz et Avery Brundage, qui tous étaient en bons termes avec le mouvement nazi. De plus, toute évaluation des politiques raciales du mouvement olympique après la Seconde Guerre mondiale doit tenir compte de la préhistoire des vingt années d’Avery Brundage à la présidence du CIO (1952-1972) et de la réapparition de son ami Carl Diem comme gardien de la flamme olympique à l’Académie olympique en Grèce. Les fonctions de direction de telles personnes à l’intérieur du mouvement olympique après 1945 démontrent que les groupes d’affinités des membres qui planifièrent et soutinrent l’Olympiade de Berlin restèrent intacts — et furent acceptés par d’autres membres olympiques — pendant de longues années après l’événement. Le seul fait que les associations nazies ne furent pas disqualifiées après 1945 à l’intérieur du cercle fermé du CIO en dit long sur les opinions raciales tacites des personnes chargées de l’administration de ce mouvement multiracial. Et ce furent les attitudes raciales essentiellement colonialistes de ces groupes d’affinités qui préservèrent l’adhésion sud-africaine au mouvement olympique jusqu’en 1970.
Le but de cette narration a été d’éclairer les origines historiques du conservatisme racial à l’intérieur du CIO. Mais il est également approprié de se demander si, à cet égard, le fonctionnement du mouvement olympique a été typique ou atypique des mouvements internationalistes occidentaux en général, et c’est ici qu’une méthodologie comparative peut nous aider à comprendre le mouvement olympique mieux qu’il n’a été compris précédemment. Comme nous l’avons vu, les mouvements olympique et scout traitent la question des races de manière étonnamment analogue, la même observation s’applique aux relations avec l’Allemagne nazie, bien que Baden-Powell semble avoir éprouvé des doutes sur Hitler que, en un certain sens, Coubertin n’avait pas mais aurait pu avoir s’il avait vécu plus longtemps (52). Même le mouvement espéranto, qui est d’origine européenne mais non colonialiste, fit des arrangements analogues pour concilier ses membres allemands et l’horizon politique de l’État nazi. La différence est que cette politique de conciliation rencontra une résistance significative à l’intérieur du mouvement espéranto lui-même, provenant d’une faction supra-nationaliste qui n’avait jamais eu son équivalent olympique (53). Encore aujourd’hui, contrairement au mouvement olympique, le mouvement espéranto a seulement une poignée de membres enregistrés en Afrique noire (54). Ce furent l’antiracialisme et l’anticolonialisme (anticapitaliste) de la Seconde Internationale socialiste (1889-1914) qui représentèrent la réelle alternative à l’internationalisme colonialiste, et nous devrions nous souvenir des Olympiades socialistes des années 1920 et 1930 comme des alternatives analogues à l’olympisme « bourgeois ». En dernière analyse, cependant, nous devons admettre qu’un eurocentrisme souvent invisible, et par conséquent puissant, a réglé les prémisses comme les pratiques de la plupart des internationalismes occidentaux, et particulièrement ceux qui proviennent de la période du tournant du siècle.

mardi 11 mars 2008

Le Parti des travailleurs fâché avec le passé de Pierre Lambert

L'Agence Bretagne Presse poursuivie en justice par le Parti des Travailleurs

Dans un article du 8 décembre 2007, signé de Damien Perrotin, et intitulé « Folklore libre-penseur à Pontivy » [ABP 8925], l'auteur, un candidat UDB des municipales de Montoir-de-Bretagne(membre du bureau politique de l'UDB), rappelle que Pierre Boussel dit Lambert, fut condamné en 1940 selon la phrase de Perrotin pour avoir tenté d'expliquer aux soldats de la république que le meilleur moyen d'arrêter les panzers de Guderian c'était de mettre la crosse en l'air et de rompre les rangs. Le Parti des Travailleurs (créé en 1990), serait injustement calomnié et associé au passé de Pierre Boussel-Lambert. Daniel Gluckstein, dirigeant de ce parti, et successeur de Pierre Boussel à la direction du Parti des Travailleurs, a porté plainte et demande 10 000 euros de dommages à ABP pour avoir diffusé ce communiqué et 20 000 à monsieur Perrotin pour l'avoir écrit et diffusé sur son blog.

ABP conteste toute responsabilité dans cette affaire. Et dénonce encore une fois le double standard qui sévit en France où des personnages comme Françoise Morvan peuvent impunément présenter dans un grand journal comme Libération le mouvement breton comme héritier du Bezen Perrot et de la collaboration, quand toute allusion au rôle défaitiste des communistes après le pacte germano-soviétique, signé le 23 août 1939 entre Hitler et Staline, est souvent ignoré par l'histoire officielle et longtemps soigneusement dissimulé par le PCF et certains partis d'extrême gauche. Marie-Georges Buffet a reconnu depuis que le PCF, en 1940, avait demandé secrètement aux Allemands l'autorisation de faire reparaître l'Humanité, et que Duclos avait invoqué des arguments antisémites.

De même, on passe souvent sous silence le fait que la grande majorité des députés socialistes a voté les pleins pouvoirs à Pétain en 1940 - un fait essentiel qui prouve que l'attachement aux principes démocratiques de gouvernement n'est pas plus l'apanage de la gauche que de la droite.

lundi 10 décembre 2007

1940 : Hitler joue, gagne et perd


Le 25 juin 2006, le président Chirac a déclaré : « Un homme […] restera comme le vainqueur de Verdun. Cet homme, c’est Philippe Pétain. Hélas ! En juin 1940, le même homme, parvenu à l’hiver de sa vie, couvrira de sa gloire le choix funeste de l’armistice… » L’armistice était-il inévitable ? Pouvait-on faire autrement ? Quelles ont été les conséquences de l’armistice sur la conduite de la guerre ? Un débat où les réponses de l’histoire heurtent douloureusement la mémoire.

Le but de Hitler en 1939 et 1940 est de réunir les conditions rendant possible la mise en place de son espace vital à l’Est de l’Europe. Après s’être efforcé d’empêcher l’Angleterre et la France d’entrer en guerre, il va chercher une victoire rapide à l’Ouest pour forcer l’Angleterre à la paix. Il réussira brillamment son objectif militaire mais il rencontrera un obstacle inattendu, un grain de sable qui va gripper sa belle mécanique expansionniste : Winston Churchill.

La décision prise par Hitler d’accorder un armistice à la France n’obéit pas à une rationalité militaire. Il eut été plus logique de poursuivre les combats quelques jours de plus et d’achever la destruction de l’Armée française tout en occupant l’intégralité du territoire français, Afrique du Nord comprise.
Cette décision est aussi peu rationnelle que celle prise par Winston Churchill au lendemain de la défaite de la France de poursuivre la guerre coûte que coûte contre l’avis d’une partie de son gouvernement et d’une fraction de son propre parti. L’historien François Delpla a bien montré que c’est pratiquement à lui seul que le premier ministre a forcé son pays à rester en guerre.
Pour comprendre cette décision hitlérienne d’arrêter les combats à l’Ouest, il faut retracer les quelques mois qui ont précédé la déclaration de guerre et rappeler les ambitions géopolitiques de Hitler, sans quoi on ne peut comprendre à la fois l’armistice et les tentatives de faire la paix avec les Anglais.

L’arrivée au pouvoir de Hitler en 1933 change la donne sur le continent. L’Allemagne est gouvernée par un homme qui veut bouleverser les frontières de l’Europe en suivant une logique géopolitique inédite.


Une ère nouvelle


L’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir en 1933 ouvre une ère nouvelle dans l’histoire de l’Europe. Par leur choix électoral, les Allemands referment la parenthèse ouverte par le traité de Versailles. Le nouveau pouvoir en Allemagne veut retrouver le chemin de la prééminence continentale.
Les projets hitlériens sont présentés avec une remarquable clarté par le Führer lui-même, non seulement dans ses écrits ou à la tribune du Reichstag (9), mais aussi dans trois discours secrets prononcés devant différents publics militaires en janvier et février 1939. Sans faire de fioritures, Hitler expose avec franchisse son projet de Weltanschauung qui passe par l’expansion militaire de l’Allemagne vers l’Est, seul moyen pour lui d’en finir avec trois siècles de décadence allemande.
Hitler veut bâtir à l’Est de l’Europe un territoire qui serait le pendant continental de l’Empire britannique. Espace, population, autosuffisance, avance technologique, unité politique et culturelle, ce nouvel empire deviendrait un candidat sérieux pour un leadership européen, capable même de rivaliser avec les Etats-Unis.
Les étapes de cette marche vers l’Est sont bien connues. Les accords de Munich en 1938 et l’annexion des Sudètes, l’annexion de la Bohème et de la Moravie le 15 mars 1939, la récupération de Memel sur la Lithuanie le 29 mars suivant.
Il reste une dure noix à croquer, la Pologne, laquelle résiste à tout changement de frontières et notamment ne cède à aucune revendication allemande au sujet de Dantzig. Winston Churchill, en solo à Londres, et la diplomatie américaine ont joué un rôle dans ce raidissement polonais. William C. Bullitt, ami de Roosevelt et ambassadeur en France, a informé les Polonais que le président américain souhaite que les nations démocratiques règlent le problème allemand. Pour les encourager l’ambassadeur a promis à ses interlocuteurs que les Etats-Unis se joindraient ultérieurement à la guerre.

Ambassadeur à Paris et grand ami de Roosevelt, William C. Bullitt encouragea les Polonais à raidir leurs positions. Plus tard, il enverra des rapports défaitistes sur la situation de la France en 1940.


Dans ces conditions, l’affrontement devient inévitable entre la Pologne et l’Allemagne. Pour calmer le jeu et bloquer les ambitions allemandes, Londres accorde des garanties à la Pologne, le 30 mars 1939. Chamberlain change la donne sans modifier pour autant la volonté de Hitler d’obtenir par les armes ce qu’il n’a pu obtenir par la négociation, l’échange ou la menace. Ainsi, dans les heures qui ont suivi l’annonce des garanties britanniques, Hitler ordonne à Keitel de préparer l’entrée en guerre contre la Pologne si les circonstances l’exigent.
Le 18 avril, Hitler déclare à Goering qu’il est prêt à l’usage de la force pour récupérer Dantzig si les Polonais n’acceptent pas de solution négociée. Un autre changement majeur se prépare. Depuis janvier 1939, Allemands et Soviétiques multiplient les gestes en direction d’un possible accord entre les deux grandes puissances. Hitler prend au sérieux la volonté de Staline de négocier quand celui-ci remplace le ministre des Affaires étrangères Maxime Litvinov d’origine juive par Vyacheslav Molotov.
Staline négocie également avec les Britanniques et les Français. Mais il a plus à gagner d’un accord avec les Allemands et les négociateurs alliés ne bénéficient pas de l’appui politique nécessaire pour forcer les Soviétiques à un accord.

C’est dans sa résidence d’été du Berghof que Hitler a planifié l’attaque de la Pologne.

La perspective d’une entente avec Staline conforte Hitler dans ses visées expansionnistes. Le 23 mai, le Führer parle durant quatre heures devant ses principaux chefs militaires. Il leur rappelle que Dantzig n’est pas le principal objectif. Son but de guerre est d’assurer à l’Allemagne l’espace vital dont elle a besoin pour nourrir ses 80 millions d’habitants.
Alors que les préparatifs militaires vont bon train, Hitler attend avec fébrilité l’annonce d’un accord avec les Soviétiques. Il joue contre la montre car l’Armée l’a informé que le 25 août est la date optimale pour une attaque contre la Pologne.
Au Royaume-Uni, les tentations conciliatrices sont fortes. Le 4 août, Chamberlain sonde l’ambassadeur d’Allemagne au sujet d’un accord mondial entre le Royaume-Uni et l’Allemagne après lequel Londres forcerait la Pologne à céder sur Dantzig. Le 9 août, le ministre des affaires étrangères Halifax répète à son tour que l’Angleterre est prête à aller très loin pour satisfaire les demandes allemandes.
Ces propositions anglaises sont en totale contradiction avec les garanties offertes à la Pologne. En d’autres circonstances elles auraient réjoui Hitler mais ce dernier attend avec impatience l’accord avec Staline, préalable indispensable pour régler la question polonaise par la guerre : chaque jour compte. La presse allemande obéissant aux consignes de Goebbels monte le ton contre la Pologne. Le redoutable Heydrich prépare les provocations devant conduire à l’entrée en Pologne des forces allemandes.
Le 12 août, le jour même où Hitler annonce au ministre des Affaires étrangères italien que l’invasion de la Pologne va commencer deux semaines plus tard, il reçoit la demande soviétique de l’envoi d’un négociateur à Moscou.
Tout en répondant favorablement à Staline, Hitler poursuit ses préparatifs militaires. Il étudie avec un soin obsessionnel le moindre détail des plans d’opérations. Le Führer s’attache même à concevoir la prise de deux ponts sur la Vistule à Dirschau par des commandos.

Dans l’attente de Staline

Toutefois, tout reste suspendu à la conclusion rapide du pacte avec les Soviétiques. Le 21 août, vers 23 h 15, la radio allemande annonce au monde la nouvelle stupéfiante que Ribbentrop va se rendre à Moscou. Le sort de la Pologne est scellé.
Le 22 août au Berghof, Hitler réunit une cinquantaine d’officiers supérieurs pour les informer de la marche des événements et pour les rassurer sur la suite des opérations. Il explique notamment que l’alliance avec l’Union soviétique rend tout blocus naval britannique inopérant. Staline livrera le blé, la viande, le pétrole, le nickel… bref, toutes les matières premières dont le Reich a besoin.
A ce stade, Hitler ne craint plus qu’une seule chose : une démarche diplomatique venant perturber ses plans. Il est incomparablement aidé dans sa tâche par le remarquable service des écoutes lequel déchiffre les messages échangés entre les diplomates étrangers. Les tentatives de Londres pour échafauder des solutions à la crise sont ainsi transmises au fur et à mesure à Hitler.
A titre d’exemple, quand l’ambassadeur anglais arrive au Berghof le 23 août pour remettre une lettre de Chamberlain à Hitler rappelant les engagements de Londres à l’égard de la Pologne, le Führer a déjà pris connaissance du texte et sa réponse ne laisse pas beaucoup de place à la négociation.
Tard dans la soirée, après d’ultimes concessions allemandes, le pacte germano-soviétique est signé. Signe tristement prémonitoire, une rarissime aurore boréale teint le ciel du Berghof en rouge sang. Impassible, Hitler ne change rien à ses plans. L’attaque de la Pologne aura lieu le 26 août à 4 h 30 du matin.

En transformant en pacte d’assistance la garantie unilatérale que Londres avait accordée à Varsovie, l’Angleterre de Chamberlain affiche sa détermination à sauver la Pologne.

Convaincre les Anglais

Revenu à Berlin, le Führer consacre une partie du 25 août à convaincre l’ambassadeur anglais de renoncer au soutien à la Pologne en échange d’une aide allemande pour assurer la protection anglaise. Conscient du dilemme britannique, Hitler avance même qu’il ne leur en voudra pas si Londres déclenche une guerre pour la forme.
Même sans garantie quant à la non intervention de l’Angleterre, Hitler annonce finalement à 15 h 02 aux officiels venus en grand nombre assister à ce moment historique que l’attaque contre la Pologne est décidée. Cette parole du Führer met la machine de guerre allemande en marche. Plus rien ne peut l’arrêter.
Plus rien ? Pas sûr. Quelques heures plus tard, le gouvernement britannique annonce son intention de ratifier le jour même l’accord de garanties offert à la Pologne. Est-il encore temps de calmer les Anglais ? Ne voulant pas compromettre cette possibilité, à 19 h 45 Hitler suspend l’attaque.
Le lendemain, l’ambassadeur de France transmet à Hitler une lettre de Daladier l’instiguant à renoncer à la guerre. Hitler l’écoute sans émotion, ne voulant trouver dans le message que le reflet du manque de combativité des Français. Au même moment, et au grand déplaisir de Hitler, les rapports de Goebbels et de la Gestapo révèlent une hostilité de la majorité des Allemands à l’idée d’une entrée en guerre.

Un stratagème diabolique

Tandis que des contacts officieux se poursuivent discrètement, Hitler imagine un stratagème diabolique. En pleine nuit, il prépare une proposition d’accord avec la Pologne en seize points d’une grande modération. Selon toute vraisemblance, les Anglais trouveront ce projet d’accord très à leur goût et ils feront pression pour que les Polonais l’acceptent à leur tour. Toutefois, il est plus que probable que Varsovie refusera cette proposition. Le pari de Hitler est que ce refus polonais leur fasse perdre l’appui britannique.
Au matin du 29 août, Hitler sort de son chapeau la première partie de son joker diplomatique. Il dit approuver le principe de négociations directes avec les Polonais à la condition qu’un plénipotentiaire arrive de Varsovie le lendemain.
Le 30 août à minuit, l’ambassadeur britannique revient à la Chancellerie où, bien entendu, ne s’est présenté aucun plénipotentiaire polonais, tout comme Hitler l’avait prévu. Avec beaucoup de machiavélisme, Ribbentrop dévoile la seconde partie du joker hitlérien en lisant à l’ambassadeur les seize propositions allemandes dont la modération frappe le ministre anglais lequel doit repartir sans une copie du texte ! À peine l’ambassadeur a-t-il quitté la Chancellerie, Hitler donne à nouveau l’ordre de déclencher l’attaque contre la Pologne.
Toute la journée du lendemain, 31 août, l’ambassadeur multiplie les démarches pour convaincre le gouvernement polonais de l’impérieuse nécessité d’envoyer un négociateur à Berlin. Varsovie refuse obstinément d’envoyer un plénipotentiaire à Berlin et mande son ambassadeur pour simplement remettre une note au gouvernement allemand. La rencontre du diplomate avec Ribbentrop est glaciale et brève. L’Allemand demande simplement au Polonais s’il est autorisé à négocier. Devant la réponse négative de son interlocuteur, l’entretien est terminé.


Aux premières heures du matin, les troupes allemandes franchissent la frontière polonaise. Plusieurs heures plus tard, des soldats jouent une petite mise en scène pour le bonheur des photographes de la presse internationale.

Le plan diabolique imaginé par Hitler semble avoir fonctionné à merveille. Appâtés par le plan en seize points concocté par Hitler, les Anglais ont poussé les Polonais à accepter une négociation directe. Comme prévu, les Polonais ont refusé de céder à la pression. Dans quelques heures la guerre va commencer et les Anglais vont rendre les Polonais responsables de leurs malheurs – d’autant plus facilement que la presse allemande va dévoiler au monde entier le texte de ces seize points, si modérés, si raisonnables, que Hitler a ciselé avec soin. Le Führer est certain de son fait. Les Anglais ne feront pas la guerre pour la Pologne.

La guerre commence

L’attaque de la Pologne commence aux petites heures du jour, le vendredi 1er septembre. Les armées allemandes avancent sans trop de difficultés en territoire polonais, même si les opérations clandestines préparées avec tant de soin se révèlent des échecs. Les Anglais réagissent mollement et exigent le retrait des Allemands du territoire polonais, mais ne fixent pas de date limite.
Tard dans la nuit du samedi 2 septembre, Londres enjoint son ambassadeur à Berlin de prendre rendez-vous avec Ribbentrop pour le lendemain à 9 h. Informé en temps réel grâce aux écoutes téléphoniques, Hitler apprend ainsi que Londres lui fixe un délai de deux heures pour arrêter les combats – faute de quoi l’Angleterre va honorer ses récents engagements à l’égard de la Pologne.
A 11 h 30, l’ambassadeur britannique informe Ribbentrop qu’un état de guerre existe désormais entre le Royaume-Uni et le Reich allemand.
La majorité des responsables allemands est atterrée par la nouvelle. La promenade militaire à l’Est se transforme en guerre européenne. Goering propose de s’envoler pour Londres mais Hitler le lui interdit.
Alors qu’à l’Est les Polonais se battent bravement, à l’Ouest, la drôle de guerre commence. A aucun moment les 110 divisions de l’Armée française ne menacent les 40 divisions allemandes qui leur font face. Les Allemands se gardent de toute initiative. Hitler interdit à la Luftwaffe d’attaquer la flotte britannique. Il est encore possible que cette drôle de guerre se transforme en drôle de paix, une fois la campagne de Pologne achevée.

Paradoxalement, le cas de la Pologne illustre les conséquences d’une capitulation sans armistice. La prise du pays par l’Armée allemande s’est accompagnée d’une politique de destruction des élites polonaises (ici une exécution de civils polonais par des troupes allemandes).


La germanisation de la Pologne

Pendant cette campagne vont se concrétiser les premières mesures prises par Hitler pour aménager l’espace vital qu’il désire pour l’Allemagne. Des plans sont imaginés pour « résoudre le problème polonais », dont l’élimination de l’intelligentsia et des Juifs, puis la germanisation d’un grand nombre de Polonais. Pour le reste, un petit état abriterait une dizaine de millions de survivants.
Dès le mois de novembre 1940, un médecin militaire adresse à Hitler une lettre détaillant un massacre commis le dimanche 8 octobre par des SS au cimetière juif de Schwetz, où vingt à trente Polonais (dont cinq à six enfants âgés de deux à huit ans) furent exécutés. Un triste signe prémonitoire.
Au retour de Hitler à Berlin le 26 septembre, la Pologne n’existe plus. Elle est divisée entre l’Allemagne et l’Union soviétique. A l’Ouest, rien de nouveau. Le lendemain, le Führer annonce à ses officiers supérieurs que la supériorité militaire allemande sur ses adversaires n’est que momentanée. Il faut obtenir au plus vite une victoire à l’Ouest car l’Angleterre n’acceptera de signer la paix que si les troupes allemandes campent sur les rivages de la Manche.

Une victoire à l’Ouest en 1940


Hitler autorise néanmoins Goering à poursuivre des contacts avec les Anglais à travers l’homme d’affaires suédois Birger Dahlerus. Mais les propositions n’aboutissent pas. Les Anglais se méfient et les négociations échouent. Alors que l’émissaire suédois attend vainement en Hollande l’arrivée des Britanniques, le 12 octobre, dans un discours à la Chambre des communes, Chamberlain réclame des faits et non des mots. Hitler répond à sa manière en donnant l’ordre le soir même de reprendre la fabrication de bombes d’aviation.
La situation est paradoxale, car le but de guerre des Alliés – la protection de la Pologne – n’a plus de raison d’être. Il semble impossible de revenir au status quo ante. Se pose aussi aux Alliés le dilemme insoluble des relations avec Staline. Quels contacts entretenir avec l’Union soviétique qui est aussi coupable d’agression contre la Pologne que le Reich allemand ? En toute logique, les Français et les Britanniques auraient dû déclarer la guerre à Staline, le seul capable pourtant de renverser l’équilibre des forces en Europe. Répondant à une question de l’ambassadeur américain qui s’étonne de ce paradoxe, Churchill déclare en octobre 1940 : « le danger pour le monde c’est l’Allemagne, pas l’Union soviétique. »
En janvier 1940, Hitler a décidé de percer le front français à Sedan après une attaque de la Belgique et des Pays-Bas. Paradoxalement, les fuites ont aggravé les conséquences du piège hitlérien dans la mesure où elles ont encouragé les Alliés à déplacer leurs meilleures troupes vers le nord.
Le général Halder à la fin janvier expose à ses subordonnés les intentions de Hitler : « Le Führer veut vaincre la France et, alors, faire une offre généreuse au Royaume-Uni. Il reconnaît son besoin d’un empire. »

Churchill fut le promoteur de l’aventureuse expédition en Norvège. Un acte d’agression selon les critères du tribunal de Nuremberg.

Les Alliés attaquent la Norvège

La drôle de guerre continue et, toujours remarquablement informé par ses services de renseignements, Hitler connaît heure par heure l’évolution du plan allié d’invasion de la Norvège. Pour brûler la politesse à l’ennemi, les Allemands mettent en route leur propre plan d’invasion le 7 avril 1940. Mais ce sont les Britanniques qui, à l’aube du 8 avril, ont les premiers commis un acte de guerre en Norvège en minant ses eaux territoriales.
Le lendemain, les Allemands envahissent le Danemark et la Norvège. La riposte alliée à Narvick fait capoter le plan astucieusement conçu par Hitler et le gouvernement norvégien finit par se rallier aux Franco-Britanniques en dépit du fait que les Alliés soient les agresseurs initiaux.


Pour l’historien allemand Karl-Heinz Frieser, la guerre éclair à l’Ouest est le résultat de l’esprit d’initiative de Guderian et de l’improvisation créatrice de la Wehrmacht à tous les échelons.

Attaquer à Sedan

Toutefois, Hitler ne perd pas de vue que son objectif immédiat est une victoire à l’Ouest. Le 10 mai, l’offensive commence par une attaque de la Belgique et des Pays-Bas. Comme prévu par les Allemands, les forces franco-britanniques franchissent la frontière belge et se portent en avant. Cette nouvelle parvient à Hitler qui explose de joie : son piège fonctionne. Le 14 mai, le Führer ordonne que toutes ses unités motorisées se concentrent à Sedan où le général von Kleist vient de franchir la Meuse. Ensemble, ces forces balayent les Français et foncent vers la mer pour couper l’élite franco-britannique de ses arrières. C’est chose faite le 20 mai. Exultant de joie, Hitler annonce à qui veut l’entendre que cette victoire effacera les conséquences du traité de Westphalie qui fit de la France le pouvoir dominant sur le continent européen.
S’il n’aime pas les Français, Hitler apprécie les Anglais. Voilà pourquoi il est disposé à offrir les meilleures conditions de paix possibles à Londres : « Nous ne pouvons ni ne voulons nous emparer de leur empire. Il y a des gens qui n’entendent raison que si on leur donne un bon coup sur la tête. »
Quel meilleur coup sur la tête que de faire prisonniers près d’un million de soldats anglais ? Pour y parvenir, il suffit de fermer la nasse où est enfermée l’armée franco-britannique. Les avant-gardes allemandes sont à seulement 15 km de Dunkerque, le port d’où s’évacuent les Anglais, quand, inexplicablement, les panzers arrêtent leur progression et ne referment pas le piège. Que s’est-il passé ?
L’historien François Delpla replace cet arrêt de l’offensive allemande dans le contexte de l’affrontement géopolitique entre l’Allemagne et l’Angleterre. Hitler ne cherche pas uniquement à gagner une bataille, il cherche à gagner la guerre en obtenant la paix avec Londres. Pour cela, il mène de front plusieurs opérations, militaires et diplomatiques. L’arrêt devant Dunkerque est une carte de plus dans son jeu.
L’historien officiel de l’armée allemande Karl-Heinz Frieser, dans son grand ouvrage consacré à la campagne de 1940, avance une autre explication. Selon ses recherches, Hitler n’est pour rien dans l’ordre d’arrêter l’offensive de la Wehrmacht. Dès le 23 mai, le commandement allemand est très divisé quant à la conduite à tenir. Les officiers des blindés veulent poursuivre l’attaque le plus vite possible. Hantés par le souvenir de la bataille de la Marne, freinés par de graves difficultés logistiques, Kluge et Rundstedt plaident pour un arrêt momentané permettant de resserrer le dispositif allemand (d’autant plus que leurs propres chars sont immobilisés depuis le matin). A 20 heures, l’ordre d’arrêt pour le lendemain est diffusé.
L’ordre est confirmé le lendemain 24 mai à 12 h 45 par Hitler en personne lors d’une visite au quartier général de Rundstedt à Charleville.



Cette carte illustre parfaitement la situation des Alliés. Après avoir percé le front français à Sedan, le poing blindé allemand se dirige à pleine vitesse vers la mer sans rencontrer d’opposition car il fonce dans la zone des armées où il n’y a rien pour s’opposer à son passage. Elle montre également la logique de l’attaque anglaise à Arras vers le sud pour rejoindre les Français attaquant vers le nord Selon l’historien allemand, l’enchaînement des événements a été après la guerre délibérément altéré par Rundstedt et par des historiens spécialisés comme Liddell Hart afin de faire retomber sur Hitler la responsabilité de cette grave erreur stratégique. Pour Karl-Heinz Frieser, rien ne permet de suggérer que Hitler ait voulu épargner les Britanniques encerclés à Dunkerque, bien au contraire. En revanche, il a voulu par la suite transformer cette erreur en argument politique en affirmant qu’il avait fait ce geste pour prouver ses bonnes dispositions à l’égard des Anglais.

De futiles coups d’épingle ?

Pour comprendre l’arrêt de l’offensive, il faut prendre en compte la tentative désespérée des Alliés pour percer les flancs de l’attaque allemande. Dans l’après-midi du 21 mai, à la double insistance de Churchill et des Français, deux divisions anglaises lancent une contre-attaque au sud d’Arras, pénètrent d’une quinzaine de kilomètres dans le dispositif ennemi, faiblement défendu, font quatre cents prisonniers mais, victimes d’un excès de pessimisme, ne poursuivent pas leur effort. Il leur manque le mordant d’un Winston Churchill qui, depuis Londres, ne cesse de pourtant les encourager en bousculant la hiérarchie militaire.


Le général Gort n’a pas compris la logique politique des ordres de Churchill. Il a rompu trop tôt l’effort à Arras et a unilatéralement brisé le front franco-anglais, peut-être sous l’influence depuis Londres de certains pacifistes.

En donnant l’ordre à ces deux divisions de reculer d’une quarantaine de kilomètres le 22 mai à 19 heures, sans avertir Weygand, le général Gort a désobéi au commandement allié et placé les unités françaises sur son flanc dans une situation critique.
Pourtant, cette offensive aurait pu, avec beaucoup de chance, altérer le cours des événements. Si Gort avait poursuivi son effort vers le sud alors que les Français avaient repris Bapaume, les Allemands se seraient en effet trouvés en fâcheuse posture. Les Anglais ont appris trop tard l’impact de leurs efforts en interceptant le 24 mai à 11 h 32 du matin un message allemand ordonnant l’arrêt de la progression des chars aux portes de Dunkerque.

L’assaut final

Le 4 juin, l’évacuation de Dunkerque sous la protection d’unités françaises sacrifiées est achevé. Environ 113 000 Français et 237 000 Britanniques ont été sauvés. Ces derniers ont abandonné 7 000 t de munitions, 90 000 fusils, 1 000 canons, 8 000 fusils-mitrailleurs, 475 chars et 38 000 véhicules à moteur. Il aurait mieux valu les risquer dans l’offensive imaginée par les Français mais dont le général Weygand reconnaîtra dans son Histoire de l’Armée française le peu de chances de succès.
Les 136 divisions de l’Armée allemande sont pratiquement intactes. L’assaut contre la France va commencer avec une supériorité de deux contre un. En tenant compte des armées belge et hollandaise, les Alliés ont perdu 66 grandes unités dans la défaite du front nord. Le courage des aviateurs français et britanniques ne pourra pas rétablir l’équilibre des forces. (2)

La Bourrasque (1927), sous les ordres du capitaine de frégate Fouqué, participe à l’évacuation de Dunkerque. Elle est coulée après avoir touché une mine le 30 mai 1940 devant Nieuport. Il y eut 16 tués et 250 à 300 disparus.

Pas de volonté conciliatrice allemande à l’égard de notre pays, Hitler déclare à ses généraux le 2 juin : « Nous pouvons facilement trouver un terrain d’entente avec les Anglais. En revanche, la France doit être écrasée. Elle doit payer l’addition. » Le même jour, il déclare au général Rundstedt : « Maintenant que l’Angleterre va probablement vouloir faire la paix, je pourrai commencer à régler son compte au bolchevisme. »
L’atmosphère dans le camp franco-anglais est sombre. Les échecs des contre-mesures mises en route par le général Weygand, la percée allemande sur la Somme rendent toute résistance illusoire.
Au cours du dernier conseil interallié, les Anglais plaident vainement pour une poursuite de la guerre coûte que coûte. « Pourquoi ne pas défendre Paris maison par maison ? », interroge Winston Churchill. Il demande également si une guerre de guérilla ne pourrait pas s’envisager.
Cela entraînerait la destruction de la France répondent les chefs militaires français, le maréchal Pétain en tête, qui ne veulent pas faire payer à la France les conséquences d’une poursuite de la guerre par les Britanniques. Il n’est pas exclu qu’ils soient influencés par le souvenir des rapports difficiles entre Français et Britanniques au cours de la bataille du Nord.
Paul Reynaud ne peut convaincre les siens de la nécessité de la poursuite de la guerre et donc d’une capitulation militaire en Métropole. Il est évident que la majorité du conseil des ministres pense que la guerre est perdue et qu’il faut attendre des jours meilleurs. Par exemple, une intervention américaine, comme l’envisage le maréchal Pétain. En attendant, il est urgent d’attendre.
Ne voulant pas endosser la responsabilité d’un armistice, le gouvernement de Paul Reynaud démissionne. Il est aussitôt remplacé par celui du maréchal Pétain, lequel demande aux Allemands les conditions d’un arrêt des combats.
A la réception de cette nouvelle, Hitler exulte. Il réfléchit plusieurs jours aux conditions qu’il va imposer aux Français. Voulant préparer le terrain pour une fin des combats avec l’Angleterre, Hitler convainc Mussolini de réserver ses ambitions territoriales pour le traité de paix à venir et informe l’amiral Raeder que la flotte française restera intacte, car invaincue.
Vers midi le 21 juin 1940, quand Hitler arrive à Compiègne, tout est prêt pour la signature de l’armistice dans le même wagon où fut signé celui de 1918.
Il ne fait pas de doute que Hitler veut par la mise en scène des discussions d’armistice effacer l’humiliation de 1918. A 01 h 35 heure allemande, le 25 juin 1940, la sonnerie de halte au feu résonne dans les radios de l’Europe continentale, marquant ainsi une des plus étonnantes victoires militaires de l’histoire.
Pour la France, l’armistice est un choc. En quarante cinq jours, le chiffre des tués s’élève à 130 000 et dans le pays les familles dans la peine sont légion. Cinquante mille femmes prennent les habits de deuil. Dans les rues d’une partie de la France, les uniformes allemands imposent leur présence, rappel constant de l’opprobre qui frappe la nation. De leur côté, les Allemands déplorent 49 000 tués et disparus ; les Britanniques 5 000 morts.

Lord Halifax fut l’un des plus ardents défenseurs d’une paix avec l’Allemagne après la désastreuse bataille de France. Mais Churchill réussit à le mettre sur la touche en le nommant ambassadeur.

Les Anglais demandent la paix

Une partie du cabinet anglais ne voit pas de raisons à la poursuite de la guerre. A l’instigation de Halifax, et en laissant Churchill dans l’ignorance de cette initiative, les Suédois demandent le 18 juin aux Allemands les conditions d’une paix entre les deux nations. Longtemps occultée dans les archives britanniques, cette initiative était connue par les messages du ministre italien à Stockholm : « L’ambassadeur britannique sir Victor Mallet a sollicité un entretien avec le ministre suédois des Affaires étrangères pour l’informer que le gouvernement britannique souhaite négocier une paix avec l’Allemagne et l’Italie. » Les Suédois transmettent l’information à Berlin mais, pressés probablement d’en finir préalablement avec la France, les Allemands ne répondent pas. Ils ignorent que cette démarche ne bénéficie pas du soutien de Churchill – lequel y met fin dès qu’il en a connaissance.

Les Allemands vont chercher le wagon où fut signé l’armistice de 1918 pour effacer symboliquement cette tache de l’histoire militaire de leur pays.

Faire la paix avec les Anglais

En cette fin de juin 1940, Hitler est certain que la guerre va s’arrêter à l’Ouest. A ses yeux, la poursuite d’un combat aussi inégal par l’Angleterre est absurde. D’un côté, l’Allemagne n’a aucune revendication à l’égard du Royaume-Uni. D’un autre côté, l’Empire britannique n’est pas en mesure de s’opposer à une puissance continentale comme l’Allemagne. Son économie est à bout de souffle et ne peut fournir les moyens d’une guerre moderne sans des importations massives en provenance des Etats-Unis, lesquelles se payent au prix fort. Or, dans quelques mois, au printemps 1941, les caisses de la Banque d’Angleterre seront vides.
Hitler est si convaincu que les Anglais vont demander la paix qu’il ne cherche pas à pousser son avantage. Il refuse de saboter les approvisionnements alimentaires britanniques ou de préparer des attaques bactériologiques, tout comme il interdit à l’amiral Raeder de planifier des attaques contre des bases de la Royal Navy ou de préparer une invasion des îles britanniques. Un des adjoints de Jodl déclare même : « Le Führer n’a pas du tout l’intention de détruire l’Empire britannique, car la chute de l’Angleterre se ferait au détriment de la race blanche. Ce qui justifie une possible paix avec l’Angleterre après la défaite de la France et au détriment de celle-ci. On demanderait le retour de nos anciennes colonies et la fin de l’influence anglaise sur le continent. En ce qui concerne l’invasion de l’Angleterre, à ce jour le Führer n’a rien prévu de tel. »

Bordeaux, fin juin 1940. Une sentinelle allemande marque l’avancée extrême de la Wehrmacht le long de la côte atlantique.

Faire payer la France

Les intentions de Hitler à l’égard de la France sont bien moins favorables. Il veut la renvoyer à ses frontières de 1540 en récupérant les territoires au nord de la Somme, la Lorraine, l’Alsace, la Franche-Comté et une partie de la Bourgogne. Mais il ne faut pas que le maréchal Pétain ait vent de ses projets avant la paix avec l’Angleterre, car il serait capable de faire passer la Marine et les colonies à l’ennemi !
Last but not least, Hitler veut obliger ses alliés et la France à adhérer à une solution générale de la question juive, notamment en cédant l’île de Madagascar qui deviendrait l’exil obligé des Juifs d’Europe.
En parallèle, Hitler réfléchit à son prochain mouvement. Fin juin, il dévoile son questionnement très directement au général Rudolf Schmundt : faut-il attaquer la Russie ? Et si oui, quand faut-il le faire ?

Le grain de sable

Progressivement, l’absence de réponse britannique à ses propositions de paix transmises par des intermédiaires, font comprendre à Hitler que Churchill n’est pas Chamberlain ou Halifax et qu’il n’a nullement l’intention de rechercher un terrain d’entente. Les bombardements à répétition de l’Allemagne en sont une démonstration bien tangible à laquelle Hitler ne veut pas répondre. Bien au contraire, le Führer prépare une intervention à la tribune du Reichstag où il fera une offre de paix très conciliante. Churchill saura-t-il la saisir ?
La réponse du premier ministre arrive de manière anticipée le 3 juillet 1940 sous la forme d’une opération coup de poing… sur la flotte française ! L’attaque de Mers El-Kébir se solde par 1 297 morts français et par l’annulation du discours prévu au Reichstag.
Comme l’a bien démontré l’historien François Delpla, Winston Churchill se révèle le grain de sable qui va enrayer la belle mécanique hitlérienne. Au lieu de régler la situation à l’Ouest pour se retourner contre l’Union soviétique, l’Allemagne se trouve avec un ennemi bien réel à l’Ouest et un ennemi futur à l’Est.

Harassées, les troupes allemandes arrêtent leur progression le 24 juin au soir.

Pour tenter de forcer la main des Anglais, Hitler donne son feu vert à des préparatifs bidon d’une invasion de l’Angleterre avec l’espoir qu’ils donnent l’avantage aux partisans de la paix. Dans son refuge portugais, le duc de Windsor ne mâche pas ses mots à l’égard de Churchill et prédit « que des bombardements prolongés prépareraient l’Angleterre pour la paix. » Le duc se dit même disposé à assumer des responsabilités politiques après un armistice entre son pays et le Reich. Quand un émissaire allemand lui explique qu’il pourrait remonter sur le trône avec son épouse américaine, le duc et la duchesse se révèlent très réceptifs à ces arguments.
Finalement, le 19 juillet, Hitler lance quand même depuis la tribune du Reichstag un appel à la paix qui fait un flop. Churchill donne même l’ordre de lancer un raid aérien dans la nuit pour donner du poids à son refus de l’offre allemande.
Hitler envoie à Stockholm un nouvel émissaire afin d’informer les Britanniques de ses offres de paix : indépendance politique pour toutes les nations européennes occupées (à l’exception de la Tchécoslovaquie), aucune demande sur l’Empire britannique et ses colonies. Sur ordre de Churchill, l’émissaire trouve porte close.
Lassé par le silence britannique, Hitler accepte les plans de Goering de faire monter la pression sur l’Angleterre par des attaques aériennes. Sans le savoir, il vient d’enclencher le processus qui va le conduire à la défaite finale. n

Pur en savoir plus

La Face cachée de 1940
François Delpla
François-Xavier de Guibert, 190 p., notes, 19 e, ISBN 2 86839841 3.